FES | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
|
|
2. Une brève présentation des relations UE-ACP 3. Les relations UE pays du Sud-Ouest de lOcéan Indien 4. Le potentiel de développement dans la région 5. Les contraintes au développement 6. Limpact de la Coopération UE-ACP 10. Quelques exemples dintérêts communs entre lUE et les ACP [page-number of print-ed.: 1 = Title page]
Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik Working papers on EU-Development Policy
5 Jérôme Boulle Survol de la coopération UE-ACP [page-number of print-ed.: 2]
Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik La série Documents de travail sur la politique de développement de lUE" traite des questions actuelles de la politique européenne de développement. Elle doit proposer un forum pour discuter doptions politiques concernant la configuration de la politique européenne de développement et le dialogue Nord-Sud. Son objectif est de contribuer à une plus grande transparence sur la voie dune politique européenne de développement coordonnée et cohérente, conformément au Traité de Maastricht. ISSN
1432-9824
La série paraît de manière irrégulière. Elle peut être commandée gratuitement auprès de la fondation: Friedrich-Ebert-Stiftung, D-53170 Bonn/Allemagne.
Copyright 1996 by Friedrich-Ebert-Stiftung
Layout: PAPYRUS Schreib- und Büroservice
[page-number of print-ed.: 3] Jérôme Boulle
En dépit de léchec apparent du développement économique de certains pays de cette région (Madagascar et les Comores), Lomé sest révélé un instrument exceptionnel pour le développement, à limpact considérable, quoique différent, dans chacun des pays. Cet impact différencié peut sexpliquer par toute une série de facteurs allant du contexte historique aux choix économiques stratégiques propres à chaque pays. Il faut que lUE donne une réponse appropriée au niveau régional à cet échec du développement. En effet, malgré de nombreuses contraintes de développement, telles que la diversité des degrés de développement économique et le manque dinfrastructures, lUE a contribué, et peut encore aider, à stimuler la coopération régionale. Lexistence dinstitutions telles que la Commission de locéan Indien dépend en partie du soutien de lUE. Les nouveaux défis pour lavenir résident dans la réorganisation du partenariat traditionnel en une alliance économique plus générale dans laquelle la régionalisation, la différenciation et la décentralisation (ouverture au secteur privé régional) seront des traits essentiels dune coopération UE-océan Indien renouvelée. Cette reformulation de la coopération européenne devrait se fonder sur la détermination, par les pays de la région, dune position commune sur ce qui doit être conservé dans les acquis de Lomé". [page-number of print-ed.: 4] Remerciements Ce document a été élaboré en vue du séminaire organisé sur le thème Lavenir de Lomé" par la Friedrich-Ebert-Stiftung à Bruxelles les 10 et 11 juin 1996 et de la conférence intitulée Lavenir des relations ACP-UE au-delà de Lomé IV", tenue du 12 au 14 juin 1996 à Maastricht, à linitiative du Centre européen de gestion des politiques de développement (ECDPM). Nous tenons à remercier lECDPM du soutien quil nous a apporté pendant la phase de préparation de ces études; la coopération régulière et constructive quil nous offre pour traiter de nombreuses questions relatives au développement nous est précieuse. Nous aimerions également exprimer notre sincère reconnaissance à tous ceux qui ont contribué au processus de publication de ces études. Leur aide et leurs efforts ont permis la réussite du projet. [page-number of print-ed.: 5] Table des matières
[page-number of print-ed.: 6] Abréviations
[page-number of print-ed.: 7] 1. Introduction Ce travail ayant été effectué dans un laps de temps très court, il na pas été possible de réunir des informations détaillées sur les pays de lOcéan Indien et de lAfrique Australe. Ainsi cette présentation ne sera pas une étude en profondeur des relations entre lUnion Européenne et la région. Elle sera davantage centrée sur les principes qui sont sous-jacents à ces relations. A souligner que lanalyse est faite non pas du point de vue du spécialiste mais de celui de lobservateur attentif et du praticien politique. [page-number of print-ed.: 8] 2. Une brève présentation des relations UE-ACP La Convention de Lomé a été décrite comme le plus vaste accord collectif de coopération entre les pays du Nord et les pays du Sud. Elle a aussi été acclamée comme un mode exemplaire de coopération qui repose sur les principes de la solidarité, du dialogue et du respect des choix politiques et économiques des parties contractantes. Cependant, en dépit de toutes ces qualités qui lui sont fort justement attribuées, la Convention de Lomé a été lobjet dattaques venant des différents secteurs durant ses vingt ans dexistence. Mais avant de considérer la performance de la Convention, quelques faits doivent être rappelés afin de remettre les débats dans leurs justes perspectives. Dabord, il faut se rappeler que la Convention nest quun élément parmi les nombreux facteurs déterminant le développement des pays du Sud. Bien que le financement européen constitue la plus importante part de laide au développement et même sil a été dun apport considérable au processus de développement dans certains pays du Sud, il ne se chiffre quà 5.5 ECU par habitant. Ce rappel nest pas pour déplorer quelque insuffisance quantitative, mais pour souligner combien la Convention ne saurait, à elle seule, assurer lavancement dun pays. Donc, il serait mal avisé de vouloir la remettre en question parce que certains Etats sont toujours en butte à des difficultés. Ensuite, même si lutilisation de divers instruments de la Convention a permis à de nombreux pays du Sud déviter la catastrophe économique, il faut reconnaître que laide au développement ne pourra jamais compenser les manques à gagner enregistrés par les pays du Sud en raison de la chute des prix des matières premières. Il est aujourdhui établi que durant les quinze dernières années, la totalité de laide fournie aux ACP a représenté moins que la moitié des pertes enregistrées en raison de leffondrement des prix des matières premières. Enfin, des changements notables et décisifs sont intervenus dans le monde depuis la signature de la Convention à Lomé, il y a vingt ans. En 1976, les paramètres de la géopolitique et du commerce international étaient différents de ceux daujourdhui. Cétait alors lépoque de la décolonisation et de la guerre froide, les Etats ACP nouvellement indépendants avaient une pertinence politico-économique pour les pays européens. Or, depuis, le monde a connu des transformations significatives. Au plan politique, la fin de la guerre froide et la chute du Mur de Berlin ont considérablement modifié les rapports entre les pays européens et ceux de lhémisphère Sud. Lors de la distribution des ressources disponibles, les voisins de lEurope de lEst retiennent davantage lattention des donateurs. Au plan institutionnel, la signature du Traité de Maastrich a occasionné une révision de la politique européenne dans de nombreux secteurs, y compris laide au développement. Lunivers économique a lui aussi connu de grands bouleversements depuis Lomé I. LUruguay round terminé, lOMC mise en place, on assiste aujourdhui à une révision de nombreux accords commerciaux. Le chapitre de la Convention de Lomé traitant de laspect commercial de la Coopération UE-ACP néchappe pas à ces considérations. Dans ce contexte, il faut souligner lémergence des pays de lAsie, qui, avec des coûts de production très bas, exercent une concurrence sur les pays ACP pour une part du marché européen en ce qui concerne les produits industriels. Les choses sont dautant plus graves pour les ACP, quand on tient compte de lintroduction du GSP, de la baisse des barèmes pour les nations les plus favorisées (MFN) et le démantèlement de laccord multi-fibre. Cest avec ce tableau comme toile de fond que les relations UE-ACP avec les pays de lOcéan Indien et de lAfrique Australe seront analysées. [page-number of print-ed.: 9] 3. Les relations UE pays du Sud-Ouest de lOcéan Indien Les relations entre lEurope et les quatre pays du bassin de lOcéan Indien prennent racine dans lhistoire de la région. Comme les autres pays ACP, les Etats du sud-ouest de lOcéan Indien à savoir Maurice, Madagascar, les Comores et les Seychelles étaient dans le passé, des colonies des puissances européennes. Malgré leur accession à lindépendance dans les années 60, ces pays étaient toujours soutenus, à bout de bras, par les anciennes métropoles. Par la suite est venue la mise en place des structures de coopération avec lEurope. On se rappellera que Madagascar faisait partie de ce premier groupe dEtats africains qui avaient fondé lOCAM, genèse de ce qui allait devenir plus tard la Convention de Lomé. Maurice sy joignit peu de temps après. Ce rappel historique est pour souligner combien dans un premier temps, en dépit de lindépendance, les Etats du sud-ouest de lOcéan Indien restaient dans un paradigme dattachement avec les anciennes métropoles. Cela est important, car cest justement la façon de gérer cette apparente contradiction qui a par la suite amené des niveaux de développement différents dans les pays de la région. Il y avait dune part, le désir de saffranchir et dautre part, la nécessité de maintenir les relations privilégiées avec lEurope. Et cela nallait pas sans donner lieu à des prises de positions tranchées à lintérieur des pays nouvellement indépendants. Dans certains cas, la conséquence a été une instabilité politique éminemment négative. Des quatre pays du sud de lOcéan Indien, Maurice est celui qui a su gérer intelligemment son capital historique. Cette ancienne colonie britannique, sest prévalue de la présence dune culture française dans le pays pour sarrimer à lOCAM et être plus tard un des signataires de la Convention de Lomé. En même temps, prenant la mesure des potentiels que lui offre son peuplement, elle se tourne vers dautres horizons: lInde, lAsie et lAfrique. Les trois autres Etats voisins de Maurice nont pas connu un cheminement similaire. Les conditions historiques nétaient dailleurs pas les mêmes. Ce rappel des conditions historiques et de létat desprit prévalant dans les années post-indépendance peut paraître hors de propos dans la discussion des relations UE-ACP. Mais à notre avis, il est utile de sen souvenir car elles démontrent combien est importante lidentification des potentiels dun pays et leur prise en compte par les dirigeants politiques, lors de lélaboration dune stratégie de développement. Ainsi, la pertinence ou non de la Convention de Lomé dans le processus de développement dun pays est tributaire de la façon dont elle aura été appréhendée au moment de la réflexion stratégique par les principaux acteurs des secteurs politiques et économiques. Lexpérience des pays du sud ouest de lOcéan Indien constitue une illustration intéressante de la façon dont a été utilisée lopportunité offerte par les relations EU-ACP. Maurice a su intégrer les possibilités quoffrent la coopération Nord-Sud avec dautres instruments de développement afin de créer une synergie dont lobjectif était de faire du pays un partenaire commercial fiable. Les Seychelles ont choisi dutiliser linstrument Lomé pour améliorer le social, alors quà Madagascar et aux Comores, en raison de circonstances bien précises, les avantages quoffre la Convention ont été en quelque sorte limités à une portée ponctuelle. [page-number of print-ed.: 10] En vingt ans, de Lomé I à Lomé IV, la République de Maurice a bénéficié, dans le cadre de laide programmable de la Coopération UE-ACP, de 100 millions dECUs. Mais Maurice a surtout pris avantage du Protocole Sucre, dont elle est le plus important bénéficiaire. Grâce à ce protocole, Maurice parvient à écouler la presque totalité de sa production sucrière à un prix supérieur aux cours mondiaux. Dautre part, laccès franc de taxe et sans réciprocité des produits textiles mauriciens sur le marché européen a permis le décollage du secteur manufacturier, mis en place il y a seulement deux décennies. On ne saurait aussi occulter lapport de lenveloppe spéciale destinée à améliorer lenvironnement et linfrastructure, qui sest révélée un soutien, même indirect, au tourisme, secteur porteur de devises étrangères et pourvoyeur demplois. La BEI, à travers les diverses dotations dont les capitaux à risques, a permis au secteur privé de mieux saffirmer et, dans certains cas, de pénétrer des domaines porteurs jusqualors inexplorés. Aux Seychelles, les ressources financières provenant de la Convention de Lomé ont surtout été canalisées vers le social. Etant donné laspect restreint des secteurs productifs tourisme et pêche les autorités seychelloises ont, fort justement, consacré les fonds disponibles à lamélioration des conditions de vie. Ainsi sous Lomé I et II, 6 millions dECUs ont été attribués au secteur du logement et à la santé. Dans un deuxième temps, sous Lomé IV a aussi permis aux Seychelles de faire bénéficier à leur secteur privé des interventions de la BEI. La planification dans le temps de lutilisation du fonds européen par les Seychelles est intéressante du point de vue de la programmation. A Madagascar et aux Comores, les relations UE-ACP ont porté plutôt sur le rattrapage dun certain retard. Les économies de ces deux pays ont subi, durant ces dernières décennies, les séquelles de linstabilité politique, de la désorganisation administrative et de la chute des prix des matières premières. Cela a amené un appauvrissement de la population et à certains moments un arrêt presque complet de la machinerie économique. Il est significatif quune large part des fonds de la Coopération UE-ACP utilisés dans ces deux pays lait été au titre du STABEX, de lajustement structurel et de laide durgence. Sous Lomé IV Madagascar a bénéficié de 70 millions dECUs pour le STABEX et 37 millions dECUs pour laide alimentaire. Quant à la République Comorienne, elle a bénéficié de 4.2 millions dECUs pour le STABEX et 6.6 millions dECUs pour lajustement structurel. Cependant, dans le cadre de laide programmable, des fonds ont été canalisés, dans ces deux pays, vers le développement rural et vers les secteurs productifs, plus particulièrement lagriculture avec pour objectif lautosuffisance alimentaire. Mais ces allocations des ressources ont eu une portée positive réduite, vu létendue du délabrement économique. En 1982, la mise sur pied de la Commission de lOcéan Indien, organisme régional regroupant Maurice, les Seychelles, Madagascar, les Comores et la Réunion, a permis de doter ces pays du sud-ouest de lOcéan Indien dune structure régionale de coopération. LUnion Européenne est le principal, sinon le seul bailleur de fonds de cette organisation régionale. Les différents projets qui touchent à la gestion des ressources marines, du transport maritime et de la météorologie ont tous été financés à partir des fonds européens. Il faudra bien mesurer limpact de cette coopération UE-ACP sur le tissu socio-économique des pays de la région, avant dentreprendre une intégration significative. [page-number of print-ed.: 11] 4. Le potentiel de développement dans la région Avant deffectuer cette démarche, on doit identifier le potentiel de développement dans la région. Les possibilités de développement quoffre chaque pays, ne prennent une signification économique régionale que si elles sont considérées dans un ensemble global. Dans létat actuel des choses, le potentiel de chacun des pays du sud-ouest de lOcéan Indien pris isolément ne peut permettre à lui seul un développement durable. Ce nest quune stratégie permettant une synergie des possibilités offertes par chacun des états qui permettra un décollage économique pouvant assurer un développement régional à long terme. Doù la nécessité dune stratégie supranationale. Pris ensemble, les pays du sud-ouest de lOcéan Indien présentent des possibilités dans tous les secteurs de production. Mais individuellement aucun deux ne réunit les conditions permettant une exploitation efficace de leurs potentialités. La richesse naturelle de Madagascar est sous-exploitée en raison de la dégradation de son infrastructure et du manque de formation de sa population. Les Comores, premier producteur de vanille et dYlang Ylang, souffrent du même syndrome. Il faut ajouter à cela lexiguïté de son territoire. La République seychelloise, qui a une population formée, des infrastructures adéquates, connaît des difficultés en raison de son manque de terre arable. Quant à Maurice qui, selon certains analystes, a pu sortir du sous-développement, elle est parvenue à un seuil où ses coûts élevés de production commencent à peser lourd face à la concurrence. Toute recherche de développement durable, pour les pays de la région, est donc tributaire de la capacité didentifier les atouts de chaque pays et den faire utilisation au bénéfice de tous. En fait la complémentarité des pays de lOcéan Indien est plus quévidente. Il sagit donc de pouvoir imaginer et mettre en place une politique qui servirait à mettre les grandes surfaces arables ainsi que la main-doeuvre à bon marché disponible à Madagascar en synergie avec, par exemple, le savoir-faire et le dynamisme du secteur privé mauricien. La pêche, laquaculture, lagro-alimentaire sont dautres exemples des secteurs où lutilisation combinée des potentiels disponibles peut donner des résultats positifs pour les pays de la région. Lexpérience mauricienne sur le plan industriel pourrait être mis à profit dans le cadre de la coopération régionale. En produisant à Madagascar, par exemple, les industriels mauriciens peuvent bénéficier dune baisse dans les coûts de production. Ce qui permettra à la région de retrouver un atout dans ce secteur très concurrentiel quest lindustrie. Par ailleurs, ce serait faire une lapalissade que de venir souligner la nécessité dun package touristique comprenant les pays de la région. Les avantages dune intégration dans la conception du produit touristique sont donc très évidents. [page-number of print-ed.: 12] 5. Les contraintes au développement Cependant il faut reconnaître que de nombreuses contraintes au développement subsistent. Elles ont même constitué un obstacle à lutilisation optimale des potentiels offerts par les pays de cette région. Un rapide examen permet den identifier un certain nombre qui relèvent du domaine politique, de la réalité économique et des mentalités. Lhistoire récente démontre que la période post-indépendance na pas été très sereine sur le plan politique dans les pays de la région. Ils ont tous à divers moments connu une période dinstabilité plus ou moins longue et nuisible suivant le pays. Même si aujourdhui, avec la démocratisation, les choses semblent plus calmes, on nest pas encore assuré dune stabilité durable. La promotion du concept de la région comme entité économique a, elle, souffert du manque dengagement des politiques. Certes, la réunion de la Commission de lOcéan Indien se tient régulièrement, mais bien souvent les politiques sont confrontés à des problèmes internes à leur pays. Ainsi, la construction dune région économiquement intégrée, devient secondaire dans leurs préoccupations. La coopération régionale attend toujours ce déclic politique qui lui permettra de prendre le grand départ. Sur le plan économique, il faut tenir compte de la situation difficile dans laquelle se trouvent certains pays. Et bien souvent ceux qui sont dans une situation moins pénible ne peuvent attendre et envisagent leur propre plan de développement, en sabstenant de tenir compte des possibilités que pourraient offrir les voisins. Cette différence dans létat des lieux économique est un sérieux obstacle à un développement intégrant les pays de la région. Les variations sont notées tant sur le plan des infrastructures que sur celui de la formation des hommes et du dynamisme des secteurs privés. Par ailleurs, léloignement des pays de la région de leur marché traditionnel, tant pour lexportation que pour limportation de certains biens entrant dans la production, gêne considérablement le processus de développement. Si lon commence maintenant à noter une amélioration dans le secteur de la télécommunication, les choses sont encore très difficiles en ce qui concerne le fret aérien et le transport maritime. Quant au social, élément clé dans tout processus de développement, il faut bien admettre quil est dun poids considérable quand on évalue les contraintes au développement. Lanalphabétisme, les conditions sanitaires, la pauvreté sont des facteurs qui retardent un envol économique. Ces problèmes sociaux retiennent non seulement les ressources, mais aussi lattention des décideurs politiques et économiques. En fait, cest léternel problème du cycle infernal de la misère. Cette réalité sociale cause-t-elle le sous-développement, ou en est-elle la conséquence? A charge pour les décideurs et agents de développement de rompre ce cycle infernal. Doù la nécessité dune conjugaison de laide avec un plan de développement durable ayant des objectifs précis. [page-number of print-ed.: 13] 6. Limpact de la Coopération UE-ACP Afin de mesurer convenablement limpact des relations UE-ACP avec les pays du Sud de lOcéan Indien, on doit dabord savoir quels en étaient les buts recherchés. Si on adopte un point de vue régional, on concèdera que les objectifs nétaient pas bien définis. La coopération avec les Etats, individuellement, a été plutôt positive dans le sens que les fonds disponibles ont été utilisés pour réaliser des opérations ayant bénéficié aux populations. La coopération UE-ACP, on le sait, nest pas limitée au seul financement de laide programmable. Elle comprend aussi le commerce, linvestissement, lassistance technique, ainsi quun soutien à la coopération régionale. [page-number of print-ed.: 14] 7. Laide programmable Laffectation des fonds daide, dans les pays de la région concernée par la présente analyse, a obéi à un schéma classique durant les trois premières conventions. Les pays bénéficiaires sattelaient à assurer le développement rural et agricole adéquat afin datteindre lautosuffisance alimentaire. Cette priorité était commune à Madagascar, Maurice et les Comores, même si les Seychelles avaient choisi de mettre plus laccent sur les secteurs sociaux. A première vue limpact a été positif à Maurice et aux Seychelles. Alors quà Madagascar et aux Comores, les résultats semblent être plutôt mitigés. Cependant, dans le cas de succès comme dans ceux ayant donné des résultats moins satisfaisants, la coopération a été sujette à dautres facteurs, tels lenvironnement macro-économique et le climat socio-politique. Maurice, on la déjà vu, avait su intégrer laide européenne comme un élément clé dans une stratégie qui recherchait la synergie à des fins de décollage économique. Aux Seychelles, le système politique en vigueur, pendant les années de Lomé I et II, a grandement facilité la mise en place dun programme axé sur le social. Si à Madagascar et aux Comores la performance paraît moins positive, il faut tenir compte des conditions défavorables, tels les cataclysmes et linstabilité socio-politique. La force de la coopération par le biais du FED réside dans le fait que les fonds disponibles dans le cadre de cette ligne de financement sont des dons. Ainsi aucune charge financière nest imposée aux pays bénéficiaires. Ceux qui parviennent à lintégrer dans une stratégie réfléchie, en tirent des bénéfices considérables pour leur population. Autre point fort de la coopération FED: elle place le pays bénéficiaire au centre du processus déterminant la façon dont laide sera utilisée. Lexercice de programmation permet de sassurer que laffectation des ressources de Lomé soit cohérente par rapport aux politiques de développements nationaux. Cependant, une évaluation de laide fournie dans le cadre de la coopération FED permet de voir des faiblesses. Très souvent la programmation par le pays bénéficiaire est faite de telle façon que les ressources sont allouées à des projets à court terme, sans aucune influence décisive sur le processus de développement économique. On doit aussi tirer les leçons des situations où la faiblesse administrative dun pays ne lui permet pas de jouer le rôle qui devrait être le sien dans le domaine de définition et dévaluation des projets. Aussi, bien souvent, les objectifs nationaux et les objectifs de la coopération ne sont pas atteints avec pour conséquence labsence de résultats tangibles. En ce qui concerne laide non-programmable, les résultats ont été plus probants. Les paiements sous le stabex ont permis à Madagascar et aux Comores de compenser en partie le manque à gagner résultant de la chute des prix des matières premières. Quant à linvestissement, la BEI a joué un rôle majeur dans lappui au secteur privé. Ce genre dopération est très significatif, car il permet la mise en place de structures visant à assurer un développement durable. [page-number of print-ed.: 15] 8. La Coopération régionale Le plus grand mérite de la coopération CEE-ACP, par rapport à la région Océan Indien, est quil a permis à la COI dexister. Cet organisme né en 1982 et regroupant les pays de la région est totalement financé par des fonds européens. Les divers projets régionaux figurant dans le programme du PIR ont mobilisé plus de 43.5 millions dECUs. Ils couvrent des domaines aussi divers que lenvironnement, lartisanat, le tourisme, la météorologie, la pêche, la santé, lagriculture, la formation, le transport maritime, la sécurité et le commerce extérieur. Il est intéressant de noter que les projets les plus récents marquent une nette progression vers des actions véritablement régionales. Le Programme Régional Intégré pour le Développement des Échanges (PRIDE) en est un exemple, mais il y a aussi celui du transport et du tourisme. Cependant, 14 ans après sa création, la COI na pu permettre un début dintégration économique. Cela est dû à la complexité du fonctionnement de la commission et à labsence dune volonté politique pour une plus grande cohésion régionale. [page-number of print-ed.: 16] 9. LAfrique Australe Avant de voir les possibles points dintérêts communs entre lUE et la sous-région, jetons un rapide coup doeil sur la situation en Afrique Australe. Pour les raisons énoncées au début du document, il ne sera pas possible de faire une étude détaillée de la coopération entre lUE et les pays de cette partie du continent africain. Le Botswana et la Namibie, très jeunes Nations, mis à part, les autres pays de lAfrique Australe ont subi durant les vingt dernières années des conditions très défavorables à leur développement. La turbulente situation politique interne dans les six autres pays de la région, ainsi que les séquelles des agressions à lépoque du régime dapartheid en Afrique du Sud ont grandement contribué à la dégradation de lenvironnement économique. Mais en dépit de ces facteurs très adverses, les pays de lAfrique Australe ont choisi depuis plus dune décennie la voie de la coopération régionale. La création de la SADCC et de la ZEP respectivement en 1980 et en 1983 témoigne de cette volonté régionale. Aujourdhui que la SADC (1992) et la Comesa (1993) ont pris la relève, lespoir est permis de voir se réaliser au cours de la prochaine décennie une intégration économique régionale significative. Lintégration économique régionale, on le sait, suppose un processus impliquant des économies autonomes dans des blocs plus larges. Axé sur lintégration des marchés, le processus évolue de la simple zone préférentielle pour aboutir un jour à une union économique, stade très avancé dintégration. Le succès de la coopération régionale, comme celui de lintégration, qui devient impérieux avec la mondialisation, dépend dun certain nombre de préalables qui sont entre autres:
Quant à la nécessité dune similarité dans les systèmes économiques et le modèle politique, la question sest résolue delle-même depuis la fin des idéologies et lavènement dune poussée démocratique à travers le monde. LAfrique Australe répond-elle à ces préalables? Certains spécialistes avancent que la réponse est négative. Mais même si tel est le cas, il appartient aux décideurs politiques et aux partenaires économiques, telle lUE, doeuvrer pour modifier les conditions objectives afin de rendre possible lintégration régionale, cest la planche de salut pour des régions économiquement défavorisées comme lAfrique Australe dans un monde qui devient de plus en plus concurrentiel. LAfrique Australe est composée de pays à développement inégal, mais elle compte une économie dominante si lon y inclue lAfrique du Sud. Les pays de lAfrique Australe ont pour la plupart des économies très ouvertes, donc vulnérables avec une dépendance accrue vis-à-vis des marchés étrangers. Quant au commerce entre les pays de cette région il ne dépasse pas la barre de 5% du volume total. Les axes dintervention dune coopération régionale devraient donc permettre dune part damener des conditions plus favorables à lintégration et dautre part de prendre avantage des possibilités offertes par les regroupements régionaux existants. Toute démarche doit pouvoir intégrer les possibilités offertes par lunion [page-number of print-ed.: 17] douanière, lunion monétaire, la Comesa et la SADC. Cependant dans cet exercice il sagit aussi de savoir transformer en atouts les désavantages causés par la présence dun partenaire dominant comme lAfrique du Sud. La meilleure approche serait de faire un examen lucide des propositions du traité dAbuja (1991) et deffectuer une évaluation réaliste de la capacité pour chaque pays de la région de jouer un rôle actif dans le processus dintégration économique qui sera, sans aucun doute, très long. Il faudra construire à partir de la force de certaines institutions, rechercher les points dintérêts communs et surtout adopter un rythme dintégration gradué qui permettra à chaque pays de participer selon ses capacités. Lexamen de celles-ci devant prendre en compte la balance commerciale, le flux commercial, les prix et le régime du contrôle des changes. LAfrique du Sud occupe une position centrale dans toute la problématique dintégration économique en Afrique Australe. Ainsi les modalités dune coopération avec la République Sud-Africaine dans le cadre de la convention de Lomé devraient être analysées en toute sérénité pour le bénéfice de la région. Toute discussion sur lintégration en Afrique Australe soulève inévitablement la question de la coopération avec des pays de la sous-région, du Sud-ouest de lOcéan Indien. Ces derniers temps Maurice, par exemple, a pris un certain nombre dinitiatives afin dêtre partie prenante des regroupements régionaux plus larges. La République Mauricienne a intégré la SADC en 1995, elle a participé à linitiative transfrontalière (Cross Border Initiative) et récemment avec dautres pays elle a émis lidée dun large regroupement régional communément appelé Indian Ocean Rim Initiative". Selon ses concepteurs, ce regroupement impliquerait tous les pays baignés par lOcéan Indien, de lAfrique du Sud à lAustralie en passant par lInde et les pays du Golfe. Initiative fort louable, mais qui ne sera pas concrétisée dans un proche avenir. Mais lessentiel en matière de coopération nest-il pas de commencer? Mention est faite de cette initiative pour souligner combien la nécessité de regroupements régionaux est présente dans lesprit des décideurs et des chercheurs. Cela devient un impératif dans un univers commercial qui, malgré la libéralisation de laprès GATT, sera longtemps encore dominé par un tripolarisme". A savoir la constitution de blocs commerciaux autour des Etats Unis, du Japon et de lEurope. [page-number of print-ed.: 18] 10. Quelques exemples dintérêts communs entre lUE et les ACP Devant ce panorama où la recherche de regroupements régionaux est constamment présente, quel rôle pour la coopération UE-ACP, après Lomé IV? Il sagit avant tout didentifier les points dintérêts communs entre dune part lUnion Européenne et dautre part les pays ACP. Etant donné la préséance de léconomie dans les relations entre Etats, les points communs doivent être identifiés dans le secteur commercial. LUnion Européenne a déjà montré la voie en indiquant ses préférences pour une coopération davantage orientée vers le secteur privé. Les coûts de production de plus en plus élevés en Europe ont déjà amené un certain nombre de firmes à délocaliser leurs opérations et à simplanter dans des pays où les facteurs de production sont moins coûteux. La délocalisation est lune des pistes à explorer. Mais il va sans dire que si le secteur privé européen trouvait des conditions plus avantageuses ailleurs que dans les pays ACP, il ne se priverait pas dy aller. Doù la nécessité pour les pays ACP de tout mettre en place dès maintenant afin que soient réunies des conditions pouvant favoriser limplantation des unités de production à capitaux européens. Ainsi, il sagit daccorder priorité à la formation, à linfrastructure, aux communications qui prendront automatiquement une importance accrue dans les plans de développement des pays ACP. Dans ce genre dopérations les deux partis sont gagnants. Une fois loption adoptée cest aux spécialistes de définir les avantages à offrir afin de parvenir à la réalisation dune telle initiative. Dans le cadre dun tel exercice, les domaines de la fiscalité, de la libre circulation des hommes et des biens devront sûrement être revus. Il faut aussi considérer la possibilité pour les entreprises européennes dutiliser les pays ACP comme tremplin pour pénétrer des marchés non-ACP, jusquici inaccessibles. Cest dans cette perspective que les initiatives de regroupements régionaux et même le vaste Indian Ocean Rim prennent une signification. Ce schéma ressemblerait fort à une recolonisation" si les pays ACP nétaient pas préparés à opérer en tant que partenaires. Mais il est bon de se rappeler que les pays ayant un secteur privé dynamique sengagent déjà dans ce genre dopérations. Pour tout dire, lesprit présidant à la recherche des points dintérêts communs entre lEurope et les ACP à lavenir devrait dépasser le simple partenariat. Il faudrait plutôt parler en terme dalliance. LAfrique Australe et la sous-région Océan Indien offrent de très bonnes perspectives dans ce contexte, entendu que les conditions prévalant dans certains pays ACP soient améliorées. [page-number of print-ed.: 19] 11. Laprès Lomé IV Lors de lexamen à mi-parcours, la Commission Européenne a déjà indiqué loption quelle favorise. On comprend que lUE soit à la recherche dune autre forme de partenariat plus efficace, pour laprès an 2000. La régionalisation est un élément clé de cette nouvelle approche. Doù lappui de plus en plus soutenu à des projets de nature régionale. Ne serait-il pas plus avisé pour les pays ACP de se préparer déjà à cette éventualité, tout en se battant pour maintenir les acquis de la Convention? Autant prendre les devants et commencer à résoudre les problèmes internes aux régions et à asseoir les bases de regroupements régionaux efficaces. A voir les stratégies proposées, il est presque évident quà la fin de la présente convention, on sacheminera vers des accords autonomes avec lAfrique, les Caraïbes et le Pacifique. Les plus pessimistes pensent quil est possible que des accords soient négociés avec des sous-régions spécifiques, à lintérieur de ces blocs. Si cela devait savérer vrai, les conséquences seraient très graves pour les ACP qui jusquici, en dépit parfois de désaccords internes, ont toujours su négocier comme une seule entité. Lautre pilier de la future coopération UE-ACP sera évidemment le recours à la coopération décentralisée et limplication du secteur privé dans les opérations. Cette démarche a été plus dune fois soulignée ces dernières années par les interlocuteurs européens. Certains pays ACP ont déjà fait les ajustements nécessaires dans leur politique afin dêtre en harmonie avec le futur mode de coopération. Il est clair quà lavenir lUnion Européenne privilégiera une situation de partenariat avec moins dintervention de lEtat et une plus grande participation du secteur privé. Cela obéit, dit-on, aux exigences de lefficience et de la productivité. La possible arrivée des pays non-signataires de la convention de Lomé dans la coopération, la fin des préférences tarifaires, et lintroduction du principe de réciprocité dans les relations commerciales UE-ACP, bouleverseront les données actuelles de la coopération. Cela nécessitera une réflexion nouvelle pour sassurer que les acquis historiques ne soient pas remis en question. Au vu des prises de positions lors de la révision à mi-parcours, lavenir de la coopération UE-ACP après lan 2000 ne paraît guère brillant. Des possibles réformes peuvent être formulées. Mais le tout doit être sujet à un dialogue politique. Les entretiens ACP-UE et même ceux entre Etats ACP au plus haut niveau politique ont été trop parcellisés jusquà maintenant. A ce jour, les ACP constituent un groupe solidaire quand il sagit de défendre les intérêts de ses membres. Cependant, on sent quil manque à ce bloc cette identité politique indispensable à tout regroupement dEtats. Dans ce contexte, La Déclaration de Maurice en novembre I995, lors de la signature du 2ème protocole financier de Lomé IV, pour un sommet des chefs dEtat ACP est une démarche qui mérite dêtre soutenue, car elle permet dentrevoir une possible cohésion politique de la part des pays du Sud. Il faut se souvenir que la signature de la 1ère convention de Lomé était avant tout un acte politique. Une fois le dialogue politique établi, les spécialistes pourront, eux, proposer les réformes nécessaires dans le cadre défini afin datteindre les objectifs fixés par la coopération. Il est urgent que les préliminaires pour un dialogue politique commencent aussitôt car les pays ACP doivent harmoniser leurs positions. Autrement, léchéance des négociations pour laprès Lomé IV arrivera sans que les pays du Sud se soient mis dans les meilleures dispositions pour défendre les acquis et jeter les bases dune coopération future pouvant leur assurer un développement durable. [page-number of print-ed.: 20] Au sujet de lauteur Edouard Jerome Boulle est actuellement Directeur de JM Logistik une firme spécialisée dans les relations publiques et lorganisation de conférences. De 1976 à 1995 il a été membre de lAssemblée Nationale mauricienne. Il a été Vice-Président de lAssemblée de 1990 à 1994. En 1994 et 1995 il a été Président de la commission denquête sur la toxicomanie et le trafic de drogue et Président du comité dorganisation pour laménagement de la zone touristique du sud-ouest de lIle Maurice. En 1986,1987 et 1992 il a été le Maire de Port-Louis. Mr Boulle a été actif au sein de la commission mixte ACP-CE, en particulier à travers son groupe de travail sur les pêcheries et la mission sur les droits de lhomme dune délégation de la commission au Soudan, en Erythrée et en Ethiopie. De 1993 à 1996 il a été éditeur du journal "Le Militant". © Friedrich Ebert Stiftung | technical support | net edition fes-library | April 2002 |