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Version français: Gerrishon K. Ikiara:
[Titre]
2. Potentiel et contraintes du développement en Afrique orientale 3. Impact des relations UE-Afrique orientale 4. Intérêts communs entre lEurope et lAfrique orientale 5. Propositions de réformes dans les relations UE-Afrique orientale [page-number of print-ed.(French part): 1= Title page] Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik Working papers on EU-Development Policy Documents de travail sur la politique du développement de lUE 4 Gerrishon K. Ikiara Les relations Union européenne-ACP:
Original: Anglais Traduction: Patrick Priem [page-number of print-ed.(French part): 2] Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik La série Documents de travail sur la politique du développement de lUE" traite des questions actuelles de la politique européenne du développement. Elle doit proposer un forum pour discuter doptions politiques concernant la configuration de la politique européenne du développement et le dialogue Nord-Sud. Son objectif est de contribuer à une plus grande transparence sur la voie dune politique européenne du développement coordonnée et cohérente, conformément au Traité de Maastricht. ISSN
1432-9824
La série paraît de manière irrégulière. Elle peut être commandée gratuitement auprès de la fondation: Friedrich-Ebert-Stiftung, D-53170 Bonn/Allemagne.
Copyright 1996 by Friedrich-Ebert-Stiftung
Layout: PAPYRUS Schreib- und Büroservice
[page-number of print-ed.(French part): 3] Gerrishon K. Ikiara
Un rapide examen du passé des relations UE-Afrique de lEst montre que lEurope a eu un impact important sur ces économies, en étant leur principal partenaire commercial ainsi que leur principale source dinvestissement. Les dispositions commerciales ont contribué à développer les exportations de certains pays. Mais, en raison de nombreuses contraintes de développement telles que le rythme lent des réformes, le manque de sécurité des investissements, ainsi que les potentiels et les structures économiques très différents de ces pays, peu dentre eux ont été capables de tirer profit de ce traitement préférentiel. Lévolution de limpact de la coopération européenne présente des résultats contrastés: elle nest apparemment pas parvenue à exercer une influence importante sur le développement du secteur commercial, mais elle a considérablement accéléré le processus des réformes politiques et économiques. Une coopération renouvelée devrait être basée sur des intérêts communs et une certaine forme de coopération devrait être maintenue et accrue dans des domaines clés tels que le développement des infrastructures dans le contexte régional, mais aussi lappui aux réformes visant à améliorer le climat dinvestissement et à augmenter les investissements étrangers. Si certains systèmes doivent être conservés (Stabex, Sysmin), dautres bénéfices pourraient être tirés dun soutien accru de lUE au processus de libéralisation de ces économies. [page-number of print-ed.(French part): 4] Remerciements Ce document a été élaboré en vue du séminaire organisé sur le thème Lavenir de Lomé" par la Friedrich-Ebert-Stiftung à Bruxelles les 10 et 11 juin 1996 et de la conférence intitulée Lavenir des relations ACP-UE au-delà de Lomé IV", tenue du 12 au 14 juin 1996 à Maastricht, à linitiative du Centre européen de gestion des politiques de développement (ECDPM). Nous tenons à remercier lECDPM du soutien quil nous a apporté pendant la phase de préparation de ces études; la coopération régulière et constructive quil nous offre pour traiter de nombreuses questions relatives au développement nous est précieuse. Nous aimerions également exprimer notre sincère reconnaissance à tous ceux qui ont contribué au processus de publication de ces études. Leur aide et leurs effort ont permis la réussite du projet. [page-number of print-ed.(French part): 5] Table des matières
[page-number of print-ed.(French part): 6] Abréviations
[page-number of print-ed.(French part): 7] 1. Introduction Ce document a pour objectif général détudier les questions susceptibles davoir un impact sur les relations futures entre les pays dAfrique orientale et lUnion européenne. Il évalue limpact de la coopération passée, le potentiel et les contraintes du développement dans cette région dAfrique et examine par ailleurs les options éventuelles en ce qui concerne les accords actuels. Il se divise en cinq sections. La section I propose un aperçu des liens historiques entre lAfrique orientale et lEurope occidentale, tandis que la section II traite du potentiel et des contraintes du développement en Afrique orientale. La section III analyse limpact de la coopération passée de lUE avec la région et la section IV se penche sur les intérêts communs entre lEurope et la région. La section V, enfin, présente certaines propositions de réformes pour la coopération future avec lUE.
1.1 Aperçu des relations entre lAfrique orientale et lUnion européenne
Les premiers contacts réguliers entre lAfrique orientale et lEurope occidentale remontent au XVe siècle, lorsquun marin portugais du nom de Vasco Da Gama débarqua sur la côte est-africaine de locéan Indien. Cest à cette époque que sinstaurèrent les contacts commerciaux et autres entre la région et lEurope occidentale, contacts qui se sont rapidement développés par la suite. Les relations connurent un tournant dramatique à la fin des années 1880, lorsque la Conférence de Berlin divisa lAfrique orientale en deux sphères dinfluence, lune anglaise, lautre allemande, deux régions qui deviendraient des colonies par la suite. LOuganda et le Kenya devinrent des colonies anglaises, tandis que le Tanganyika devint une colonie allemande. Après la première guerre mondiale, lensemble de lAfrique orientale passa sous le régime colonial britannique. Pendant cette période, les autres pays dAfrique orientale vinrent à subir linfluence européenne: le Soudan linfluence britannique, la Somalie linfluence italienne et britannique, et le Rwanda et le Burundi linfluence belge. Seule lEthiopie résista à létablissement dun régime colonial total après sa guerre avec lItalie. Cette montée de la colonisation fut à lorigine dune série de changements importants dans le processus de développement économique, politique et socio-culturel de la région. La domination coloniale, qui a duré moins de 100 ans, jusquà lindépendance des pays de la région au début des années 60, a laissé une forte empreinte européenne encore bien perceptible de nos jours. Un regard sur les flux dinvestissement, les aides et les autres aspects actuels des relations économiques nous renseigne sur la force de linfluence exercée par lEurope occidentale en Afrique orientale. Les modèles commerciaux en vigueur dans les pays de la région témoignent de la part importante que lEurope occidentale continue à détenir dans les exportations et les importations de pays tels que le Kenya, lOuganda et la Tanzanie. En ce qui concerne le Kenya, par exemple, 60% de ses exportations allaient à lEurope occidentale au moment de son indépendance en 1963 (le Royaume-Uni seul sadjugeant 25% des exportations totales). En ce qui concerne les importations, 53% de celles du Kenya provenaient dEurope occidentale (31% du Royaume-Uni) en 1963. Ce modèle de commerce sest appliqué dans une mesure plus ou moins importante aux autres pays de la région (tableau 1). Si les modèles commerciaux se sont diversifiés depuis lors, la domination de lEurope occidentale, en revanche, demeure. Outre le commerce, lEurope occidentale fournit également le plus important volume dinvestisse- [page-number of print-ed.(French part): 8] ments dans la région, bien que des pays comme le Japon et les Etats-Unis naient cessé de gagner en importance au cours des années 80 et 90. Limpact de lEurope occidentale sur lAfrique orientale ainsi que sur dautres régions du continent a toujours donné lieu à de vives controverses et à des interprétations radicales. Dun côté, il y a ceux qui considèrent la venue de lEurope occidentale en Afrique comme le début de la modernisation du continent, mais il y a également une autre école, dont font partie des penseurs comme Walter Rodney, qui ont attribué le sous-développement du continent à la domination et à lexploitation par lEurope occidentale (Walter Rodney, 1972).
Part de lEurope et lUnion européenne dans les exportations totales de lAfrique orientale.
Source: FMI: Direction des statistiques commerciales.
[page-number of print-ed.(French part): 9] Pour ce qui est des deux dernières décennies, les pays dAfrique orientale, comme dautres pays de la région Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP), ont engagé des relations avec lEurope occidentale, principalement dans le contexte de la Convention de Lomé, qui fut signée pour la première fois par la CEE et les Etats membres des ACP en février 1975. Laccord mettait laccent sur la coopération au développement commercial, financier et industriel entre la CEE et les Etats membres des ACP. Les deuxième et troisième Conventions de Lomé furent conclues et signées respectivement en 1979 et en 1985. Ces conventions antérieures avaient comme particularité de permettre à certains produits des pays membres des ACP de bénéficier dun traitement préférentiel sur les marchés européens. Ce traitement préférentiel prenait essentiellement la forme dune exemption de droit de douane et dune suppression des barrières quantitatives à limportation sur une large gamme de produits manufacturés en provenance des pays ACP. En outre, certaines matières premières et certaines exportations agricoles des ACP qui entraient dans le champ de la Politique agricole commune (PAC) de la CEE bénéficièrent dun traitement spécial sur les marchés communautaires, par rapport à des produits similaires provenant de pays non-ACP. Parmi les produits bénéficiant des accords de Lomé figuraient la viande de buf et de veau, le poisson, les produits laitiers, les céréales, les fruits, le tabac, les biscuits et les chocolats ainsi que les fleurs coupées. Cest ainsi que les exportations de fleurs coupées du Kenya ont augmenté considérablement depuis ce temps-là. La convention prévoyait également que les pays ACP bénéficieraient dune assistance technique de la part des pays de la CEE dans des domaines tels que la promotion du commerce, létude des marchés et le développement des systèmes dinformation destinés à faciliter le commerce. [page-number of print-ed.(French part): 10] 2. Potentiel et contraintes du développement en Afrique orientale
2.1 Potentiel de la région
La région dAfrique orientale se compose grosso modo de dix pays présentant des structures et des potentiels économiques fort différents. Au total, ils couvrent une superficie de plus de 6 millions de km2 et comptaient une population denviron 180 millions dhabitants à la mi-1994 (tableau 2). Cette région comprend certains des pays les plus vastes du continent, comme le Soudan, dune superficie de 2.506.000 km2, et la Tanzanie. La région possède également certains pays de très petite taille tels que Djibouti, le Burundi et le Rwanda, chacun dune superficie inférieure à 30.000 km2. En termes de population, lEthiopie est le pays le plus important avec plus de 53 millions dhabitants, suivie par la Tanzanie, le Kenya et le Soudan.
Certains indicateurs économiques sélectionnés dAfrique orientale, 1991-1994.
Source: BAD: Rapport sur le développement de lAfrique, 1995. La production annuelle de la région pour la période 1991-1994 sétablissait en moyenne à 44 milliards dUSD, la Tanzanie, lEthiopie, le Kenya et le Soudan sadjugeant environ 81% du total. Les pays dAfrique orientale ont enregistré dans lensemble un faible taux de croissance de leur PIB (1,3%) durant cette période. En effet, presquun tiers des pays ont connu des taux de croissance négatifs. Les seuls pays à enregistrer des taux de croissance substantiels furent le Soudan (5,4%) et lOuganda (5,0%) durant la période 1991-1994. Avec une population proche des 200 millions dhabitants, croissant à un rythme de plus de 2% par an, la région dAfrique orientale possède un énorme potentiel en tant que marché. Toutefois, [page-number of print-ed.(French part): 11] le modeste niveau du PIB par habitant dans presque tous les pays réduit sérieusement le pouvoir dachat réel des habitants de la région. Dès lors, le potentiel de marché de la région dAfrique orientale en ce qui concerne les biens issus de la région, de lUnion européenne et dautres parties du monde ne peut être exploité que si une stratégie efficace est mise en place pour accroître la productivité de la main-duvre et dautres facteurs de production dans la région, en accroissant ainsi le PIB par habitant, et, partant, le pouvoir dachat de la population. Le PIB par habitant de la région pendant la période 1991-1994 était denviron 240 USD, le PIB par habitant le plus élevé étant celui de Djibouti (500 USD), suivi par celui de la Tanzanie (354 USD) et du Kenya (304 USD).
2.2 Modèles commerciaux
Le tableau 3 donne un profil du commerce de la région par pays pour différentes périodes de 1991 à 1994. Les principaux produits dexportation de la région sont des produits primaires qui représentent plus de 50% des exportations totales de chaque pays. La structure du commerce est toujours lourdement dominée par les produits primaires qui souffrent dune faible élasticité de la demande. La région a donc été essentiellement une source de matières premières. Un examen plus approfondi révèle que les principales destinations dexportation et sources dimportation sont étroitement liées à lhistoire des divers pays. Le Kenya et lOuganda, anciennes colonies britanniques, ont le Royaume-Uni comme principal partenaire commercial. Le même principe sapplique au Burundi et au Rwanda, ainsi quà la Somalie, qui entretiennent dimportants échanges commerciaux respectivement avec la Belgique et avec lItalie. La France reste également le principal partenaire commercial des anciennes colonies françaises. Les principales exportations agricoles de la région sont les produits tropicaux. Les recettes de lexportation de ces produits le café et le thé sont essentielles étant donné que certains Etats de la région dépendent dun ou de quelques produits tropicaux qui assurent la majorité de leurs recettes dexportation. Les fleurs coupées sont un exemple dun produit tropical non traditionnel, dont la production a été une réussite dans la région ces dernières années, le Kenya en étant le principal exportateur. Les bananes sont un produit dexportation important pour la Somalie. Avec lintégration du marché de lUE, le nouveau régime applicable aux bananes peut dans une certaine mesure réduire la compétitivité des bananes de la région sur le marché de lUE. Par le passé, ces produits avaient conquis des marchés en Italie et en France, alors quà présent ils doivent entrer en concurrence avec les fruits moins cher dEquateur, de Colombie et dAmérique centrale. Le sucre est un important produit de base agricole pour certains pays de la région. Les producteurs de sucre de la région comprennent la Tanzanie, lOuganda et le Kenya, toutefois nettement moins importants que la Maurice et le Swaziland, qui sadjugent plus de 60% des exportations de produits de base dAfrique. La Tanzanie a un quota de 10.000 tonnes, tandis que le Kenya et lOuganda bénéficient de quotas insignifiants de 5.000 tonnes chacun sur le marché de lUE. La région pourrait bénéficier dun quota plus large. Cette perspective est toutefois entravée par des pressions émanant des cultivateurs de betteraves sucrières européens qui font état dun excédent de sucre au sein de lUE pour étayer leurs arguments. Le buf et le veau sont également des produits présentant un potentiel considérable pour lAfrique orientale, où le pastoralisme reste une activité économique majeure. Selon Lomé IV, le plus important quota de la région en ce qui concerne le buf et le veau est de 142 tonnes pour le Kenya, ce qui est infime par rapport aux 18.916 tonnes du Botswana et aux 9.100 tonnes du Zimbabwe. Le Kenya na toutefois pas exploité réellement son quota en raison des problèmes récents qua connus la principale société semi-publique de transformation de la viande, la Kenya Meat Commission (KMC), et de sécheresses répétées. Les articles 3 et 4 du protocole sur le buf et le veau expriment une volonté denvisager un transfert de quotas entre années et entre Etats ACP lorsque des problèmes dapprovisionnement (séche- [page-number of print-ed.(French part): 12] resse, etc
) conduisent à une non-utilisation des quotas. Lattribution de nouveaux quotas pour le boeuf à la région est improbable bien quelle pourrait aider lEthiopie qui vient dinclure le buf dans sa liste des produits susceptibles dêtre exportés vers lUE.
Modèles commerciaux en Afrique orientale:
Source: EIU Various Issues, IMF Directory of Trade Statistics Year book. [page-number of print-ed.(French part): 13] La transformation du poisson est un des plus beaux exemples de réussite à la fois dans la région et dans dautres pays ACP. Le poisson surgelé, à lexclusion des filets, constitue 12,4% des exportations totales (principalement en provenance du Kenya, du Sénégal et de la Namibie). Les règles dorigine sont toutefois considérées comme un obstacle à lexpansion des exportations de poisson vers le marché de lUE. Pour répondre aux règles dorigine, le poisson doit être pris par des bateaux enregistrés dans lUE ou dans les Etats ACP et détenus à 50% au moins par des ressortissants de ces pays. Dautres restrictions sont imposées sur les nationalités des membres déquipage. A ces critères de base viennent sajouter des règles spécifiques à chaque produit. La transformation des produits du poisson en vue de leur accès préférentiel au marché de lUE est confronté à une double barrière due à lapplication des critères de règles dorigine à la fois pour les intrants primaires et pour les produits transformés. Ces règles constituent probablement le handicap le plus important pour le commerce des produits du poisson. Pour que les fabricants bénéficient dune exemption de barrières douanières, de prélèvements, de droits ou de barrières similaires, les exportations des ACP doivent avoir leur origine" dans les ACP. Les produits doivent être obtenus en totalité ou transformés dans une mesure suffisante dans un Etat ACP. Les règles dorigine exigent normalement une transformation substantielle", c-à-d. un changement de position dans la nomenclature à quatre chiffres du système harmonisé. Mais ceci nest pas toujours suffisant. Ainsi, le simple montage de pièces et darticles afin de constituer un article complet ne permettra pas à celui-ci de bénéficier dun traitement préférentiel en vertu des règles dorigine actuellement en vigueur. Ces règles dorigine sont bien trop strictes pour la région compte tenu du fait que lindustrialisation y est dans sa phase naissante. Le Kenya et lEthiopie ont respectivement pris à leur charge 18% et 11% des exportations ACP de cuir, de peaux et de cuirs tannés en 1994. Les pays ACP ont été exclus de lArrangement Multifibres (AMFF), qui a imposé des restrictions aux exportations de textiles et de vêtements des pays en développement vers lUE et dautres pays industrialisés depuis 1974. Les exportations de textiles et de vêtements des ACP vers lUE ne sont pas soumis à des restrictions quantitatives officielles, ce qui leur a procuré un avantage concurrentiel par rapport à dautres pays en développement qui doivent généralement faire face à des restrictions élevées sur leurs exportations en matière de tarifs douaniers et de contingents. Toutefois, pour bénéficier dun accès en franchise de droits, les exportateurs des ACP doivent respecter des règles dorigine strictes. La fabrication de textiles et de vêtements doit généralement commencer au stade du fil. Il sy applique un critère de valeur ajoutée spécifiant la part maximale de matières non originaires, généralement 45%, auquels viennent sajouter dautres conditions concernant la part de certaines matières non originaires. Plus dun tiers des exportations ACP de textiles et de vêtements sont constitués de matières premières, qui sont exclues de lAMF. Il sagit pour la plupart de coton brut auquel aucune valeur na été ajoutée par lexportateur par teinture ou toute autre forme de traitement et qui bénéficie de toute manière dun accès en franchise de droits à lUE. La Tanzanie et le Soudan figurent parmi les producteurs de la région. Le plus grand producteur de la région est le Soudan qui dépend des textiles pour une part relativement importante de ses recettes dexportation. Nous pouvons dès lors conclure quà ce stade, seuls quelques pays ont exploité le traitement préférentiel pour les exportations de textiles et de vêtements vers lUE.
2.3 Contraintes du développement socio-économique en Afrique orientale
Il existe un certain nombre de contraintes, notamment climatiques, économiques, politiques, institutionnelles et socioculturelles, qui ont compliqué lexploitation du potentiel présent dans la région. Une des principales contraintes qui affecte les pays de la région est la pression démographique [page-number of print-ed.(French part): 14] excessive. La population, qui accuse un taux de croissance annuelle denviron 3%, double tous les 20 ans dans la plupart des pays de la région. Cette situation a fait peser une pression excessive sur les ressources de ces économies fragiles, avec des effets négatifs sur leur capacité à épargner et à investir, à offrir des infrastructures adéquates pour les services essentiels tels que léducation, la santé, le logement, leau et lhygiène, les transports, et à fournir des emplois. En outre, la pression croissante qui pèse sur les ressources de la terre dans certains de ces pays a conduit à une érosion des sols, à une disparition progressive des forêts et à une raréfaction des captages deau, autant de phénomènes qui constituent une menace importante pour lenvironnement. La détérioration permanente de la qualité des conditions denvironnement va probablement aggraver le niveau de pauvreté et le faible niveau général de bien-être des peuples qui vivent dans bon nombre de ces pays. Le danger vis-à-vis de lenvironnement en Afrique orientale est particulièrement grave eu égard à la fragilité de lécosystème, notamment en raison de la haute fréquence des sécheresses. Le déclin de lattrait de la région pour les investisseurs étrangers au cours des deux dernières décennies a également entravé toute stimulation de la croissance économique. Ce problème a été dans une certaine mesure attribué à lapplication de politiques macro-économiques médiocres au cours des deux premières décennies, à une instabilité ou une incertitude politiques, à des niveaux élevés de corruption et à des erreurs de gestion des ressources économiques, mais aussi à des infrastructures inadéquates et inefficaces, qui ont conduit à la création dun environnement peu propice aux investisseurs nationaux et étrangers. Les réformes politiques et économiques en cours dans la région depuis le début des années 80 auraient dû éliminer ou, à tout le moins, réduire certaines de ces contraintes. Toutefois, le processus de réforme a été plutôt lent dans de nombreux pays et les avantages promis ne se sont pas matérialisés de manière significative. Labsence dune percée décisive dans la compétitivité à lexportation pour bon nombre des pays de la région et de leurs produits a ralenti le rythme de la transformation économique, et les pays sont donc restés lourdement tributaires des exportations de produits de base, ce qui traduit léchec général à diversifier de manière substantielle leurs activités économiques.
Dette extérieure
La crise de la dette qui a commencé en 1981 a persisté sans que la région montre le moindre signe de redressement. Le niveau élevé de lendettement extérieur est devenu un obstacle majeur aux efforts de développement de la région. Le tableau ci-dessous donne une image peu engageante de la situation, puisque tous les pays de la région font partie des pays à faible revenu gravement endettés. Ces pays ont enregistré de surcroît une détérioration rapide de leur capacité de service de la dette (tableau 4). Le surendettement et la forte dépendance par rapport aux aides resteront longtemps encore une charge très lourde à supporter pour la région. Toutefois, ils engendrent également un certain nombre de problèmes insurmontables:
Le service de la dette extérieure continue à représenter une lourde charge, les coefficients de service de la dette sétablissant en moyenne à 60% (ATD/XGS) dans la région (tableau 5). Le paiement dintérêts, comme le montre le rapport INT/XGS, gonfle exagérément une partie du PIB de ces pays. Les plus touchés dentre eux sont la Somalie, le Soudan et la Tanzanie.
[page-number of print-ed.(French part): 15]
Situation de la dette extérieure par pays
Source: Banque mondiale: tableaux de la dette mondiale, 1994/1995.
Taux dendettement par pays 1992-1994.
Source: Banque mondiale (Système de notification de la dette).
[page-number of print-ed.(French part): 16] 3. Impact des relations UE-Afrique orientale Lomé a été une des organisations que les Etats africains ont continué à prendre très au sérieux, puisque pratiquement tous ont participé aux quatre dernières conventions. La quatrième Convention (Lomé IV) a été signée en 1989, succédant aux accords précédents signés à Lomé en 1975, 1979 et 1984. Lomé IV a maintenu les objectifs de développement à long terme des conventions précédentes, mais laccent sest déplacé sur la réforme des politiques économiques dans les Etats membres afin de saligner sur limportance générale accordée par les organes de financement multilatéraux à la conditionnalité. Pour évaluer limpact de la convention Lomé IV, il est important de prendre en considération les quatre éléments principaux de la composante commerciale de la convention. Il sagit de laccès préférentiel au marché de lUE pour les exportateurs des ACP sans aucune réciprocité, du mécanisme de stabilisation des recettes de lexportation de produits de base au moyen du système STABEX, du soutien des activités destinées à renforcer les performances du secteur commercial par la coopération en matière de développement commercial, qui était censé favoriser la diversification de léconomie sur le plan horizontal et vertical par le développement et le renforcement dactivités telles que la transformation, le marketing, la distribution et le transport, et finalement de lintensification des échanges en matière de services. Bien que chacun des domaines ci-dessus ait été négocié par les pays ACP, les avantages quils en retirent napparaissent pas toujours de manière évidente. En ce qui concerne cette question, Adededji constate que: La mesure dans laquelle ces avantages ont été améliorés est difficile à évaluer étant donné que le secteur commercial de lAfrique continue à afficher des performances médiocres en dépit du traitement préférentiel des ses produits à la fois aux termes de la Convention et du SGP". (Adededji, 1992: 3).
3.1 Impact de lAccès préférentiel au marché
Une analyse du commerce entre lAfrique et lUnion européenne montre que les arrangements préférentiels de Lomé nont peut-être pas eu leffet daccoître de manière durable la part de lAfrique et dautres pays membres des ACP dans les importations de lUE. Si lon examine les statistiques sur les importations et les exportations de lAfrique sur la période allant des années 70 aux années 90, la convention ne semble pas avoir eu dimpact durable sur le renforcement du commerce entre lAfrique et lUnion européenne. La part des exportations africaines vers lUE a décliné denviron 50%, passant de 6% en 1976 à 3,3% en 1992. En termes de valeur, cependant, les exportations africaines vers lUE sont passées de 9,4 milliards dECU en 1976 à 24,2 milliards dECU en 1985 avant de retomber à 16 milliards dECU en 1992. Une tendance semblable a pu être observée dans le cas dautres groupes ACP (tableau 7). En termes de groupes spécifiques de produits de base destinés à lexportation, la part des exportations africaines de denrées alimentaires, de matières premières agricoles, et de minerais et de métaux a enregistré un recul substantiel entre 1970 et 1990 (tableau 6). Décriant la chute de la part de lAfrique dans les importations de lUE de 6,3% en 1980 à 3,3% seulement en 1992, Adededji, lancien secrétaire général de la CEA observe: Les perspectives ne semblent pas brillantes étant donné que lAfrique perd du terrain sur le plan de sa compétitivité générale sur le plan de la production et du commerce par rapport à dautres pays du tiers- [page-number of print-ed.(French part): 17] monde, notamment des pays dAsie orientale et du Pacifique" (Adededji, A, 1992: 3). Entre 1973 et 1992, six pays dAsie orientale qui navaient aucun accord préférentiel avec lUnion européenne ont porté leur part dexportations vers les marchés de lUnion de 1,5% à 3,6%.
Part des exportations africaines dans lUE par groupe de produits de base (%).
Source: Guide du commerce international et statistiques de développement de la CNUCED, 1992, (citée dans Adededji, 1996).
Tendances dans les importations de lUE en provenance des Etats membres des ACP et part dans les importations totales de lUE (valeur en milliards dECU)
Source: Données Eurostat, citées dans Adededji; 1976.
Il est donc clair que le succès sur le marché de lUnion ne dépend pas de lexistence daccords préférentiels mais davantage de la compétitivité des produits. Une analyse des prestations de lAfrique à la fois sur le plan commercial et sur celui du développement, les deux principaux domaines de coopération entre lUE et les ACP aux termes de la convention de Lomé, indique que la Convention a plus ou moins échoué dans ses principaux objectifs: En dépit de leur confiance et dun engagement profond dans cette coopération, la Convention nest pas parvenue à exercer un impact suffisant sur le développement du secteur commercial de lAfrique, comme en attestent la diminution des parts commerciales et labsence de diversification." (Adededji, A., 1992: 3). Un des principaux objectifs de la coopération commerciale dans la Convention de Lomé était de promouvoir le commerce entre les ACP et les Etats membres de lUE en offrant un traitement préférentiel à certains produits des ACP importés sur le marché de lUE et en améliorant laccès au marché. Autrement dit, à lexception de certains produits relevant de la Politique agricole commune de lUE, de nombreux articles dimportation en provenance des pays africains étaient autorisés à entrer sur le marché de lUE sans devoir acquitter de droits de douane. Selon la convention, il nétait pas nécessaire non plus [page-number of print-ed.(French part): 18] pour ce groupe de pays ACP doffrir les mêmes préférences en retour aux pays de lUE. Selon Lomé IV, les produits des ACP qui peuvent être exportés en franchise de droits vers le marché de lUE comprennent des boissons telles que le cacao et le thé, des épices, des bois tropicaux bruts, du poisson frais, des produits de jute, des cordages en fils de sisal, du cuivre, des phosphates de cuivre et des produits pétrochimiques. Cette liste est importante dans la mesure où les articles qui y figurent couvrent plus de 60% des exportations de lAfrique. Certains critiques ont allégué que le sacrifice consenti par lUE sur ces conditions de franchise de droits est minime parce que tout dabord, il sagit de produits qui ne concurrencent pour ainsi dire pas les produits de lUE et ensuite, parce que les mêmes préférences sont accordées à des pays africains sur dautres grands marchés internationaux comme lAmérique du Nord et le Japon dans le cadre du système généralisé de préférences (SGP) en faveur des pays les moins développés. Il existe dautres produits susceptibles de bénéficier de tarifs préférentiels dans le cadre de Lomé, en plus des taux du SGP. Il sagit notamment des huiles végétales, du café, du poisson et de la viande, du riz, des fruits tropicaux, des jus de fruits et des produits issus de graines oléagineuses. Une large proportion de produits de base de cette seconde catégorie est extrêmement importante pour un grand nombre de pays dAfrique orientale. Le café est un produit dexportation essentiel pour le Kenya, la Tanzanie, lOuganda, lEthiopie, le Rwanda et le Burundi, par exemple, tandis que bon nombre de pays de la région affichent un potentiel important pour certains autres produits de base comme les huiles végétales, les produits issus des graines oléagineuses, le poisson et les produits transformés à base de poisson, les fruits tropicaux et les jus de fruits. La troisième catégorie darticles commerciaux se compose des produits relevant de la Politique agricole commune. Ces produits sont lourdement protégés par le biais de subventions. Parmi les produits qui entrent dans cette catégorie figurent les bananes, le sucre, le buf et le veau, ainsi que le rhum. Les Etats membres des ACP nobtiennent laccès au marché pour ces produits que par des protocoles spéciaux qui stipulent clairement les conditions dans lesquelles ces produits peuvent être exportés vers les marchés de lUE. Les conditions qui sont généralement imposées pour cet accès comprennent les restrictions contingentaires, les garanties sur les prix, les calendriers, etc. Bien que les motivations sous-tendant ces conditions soient claires pour les membres de lUE, il existe certaines situations dans lesquelles ces conditions spéciales ont été utilisées pour empêcher certains pays africains dexporter davantage de certains articles dont le potentiel sur le marché de lUE est élevé. Cest dans ce contexte que certains ont fait valoir que quelques-uns des pays africains pouvaient bénéficier davantage de la libéralisation générale du commerce agricole avec lUE dans le contexte de lOMC que des préférences existantes sur certains articles. Dans le cadre dune aussi large libéralisation de lagriculture européenne, les pays africains qui sont capables daugmenter leur productivité et leur compétitivité pourraient accroître leur part sur les marchés de lUE pour certains de leurs produits. Lextension récente des exportations kenyiennes de produits horticoles vers lUE démontre que cela est possible et que cela apporterait une contribution importante à la lutte en faveur de la diversification des économies africaines. Limpact de la disposition daccès en franchise de droits a été érodé par lexistence de diverses mesures non tarifaires à lintérieur du marché de lUE, parmi lesquelles des barrières quantitatives imposées à certains produits agricoles susceptibles de bénéficier dune entrée en franchise de droits, comme le buf et le veau, les fruits, les légumes et le riz. En Afrique orientale, le Kenya a réuni les conditions pour pouvoir exporter de la viande vers le marché de lUE à des conditions préférentielles, mais moyennant un quota annuel. Il existe dautres barrières non tarifaires qui ont eu un effet négatif sur laccès au marché de lUE, comme les prélèvements et autres droits appliqués à la discrétion des fonctionnai- [page-number of print-ed.(French part): 19] res de la douane et parfois la nécessité dimposer un taxe équivalente sur le produit à lexportation. Les taxes sur les ventes sur le marché intérieur levées sur la vente de certains produits des ACP ont également tendu à réduire la concurrence de lUE sur le marché. Il existe toutefois quelques pays qui ont réussi à tirer avantage des dispositions daccès au marché de lactuelle convention de Lomé et qui ont considérablement diversifié leurs exportations vers lEurope. Lune des réussites les plus brillantes en la matière est celle de la Maurice, qui sest convertie dune économie dépendant exclusivement du sucre en une des économies les plus dynamiques dAfrique. Les textiles sont progressivement devenus un produit de base dexportation important de la Maurice vers le marché de lUE, contribuant ainsi à élargir la base économique du pays. Le Kenya est également parvenu à développer son secteur horticole, qui sest ainsi converti en une des principales sources dexportation du pays au cours de la dernière décennie. Le pays a su exploiter les conditions daccès au marché des produits ACP dans lUnion européenne.
IED entrant dans certains pays de la région 1981-1985, 1986-1990.
Source: Guide du commerce international et statistiques de développement de la CNUCED.
Mais lanalyse des quatre conventions de Lomé indique que les produits qui entrent en concurrence avec des produits des régions tempérées nont pas toujours eu cette chance. Au fil du temps, ils ont dû faire face à divers types de barrières tarifaires et non tarifaires, notamment les quotas, les prélèvements, les calendriers de commercialisation et les prix de référence qui obligent les exportateurs de fruits et de légumes frais sur les marchés de lUE à ne pas fixer de prix en dessous dun prix de référence donné.
3.2 Systèmes STABEX et SYSMIN
Les transferts effectués dans les conditions du système STABEX ont pour but daider les Etats ACP à stabiliser leurs recettes dexportation et de faciliter une croissance et un développement économiques et sociaux durables. Bien quelle ait été considérée comme une des principales dispositions des conventions de Lomé, elle présente quelques limitations majeures, notamment:
Pour de nombreux Etats membres des ACP, la compensation quils obtiennent des systèmes STABEX et SYSMIN est infime par rapport aux pertes encourues suite aux fluctuations des prix de leurs principaux produits de base dexportation. Il a été souligné, par exemple, qualors que les pays ACP perdaient environ 100 milliards dUSD dans les années 80 en raison de la chute des prix à lexportation, ils ne recevaient que 50 milliards dUSD daide au total, toutes sources confondues, durant la même période (Courier No. 155:4).
3.3 Autres impacts des relations UE-Afrique
Les relations entre lUE et lAfrique ont notamment eu pour effet daccélérer le rythme des réformes politiques et économiques dans plusieurs pays du continent africain. Depuis la signature de Lomé II en 1979, les questions relatives aux droits de lhomme ont pris une importance croissante dans les relations entre les deux groupes. Dans Lomé IV, cest la question de lajustement structurel qui a reçu la plus grande attention. La convention comprenait également des dispositions sur la démocratie, les principes de bonne conduite des affaires publiques et les droits de lhomme. Bien que certains pays dAfrique orientale aient été plutôt mécontents de ces dispositions, la principale préoccupation des membres de lUE a permis daccélérer le rythme de la démocratisation et des réformes économiques dans ces pays. Même si les autorités en place ont quelquefois protesté contre ce quelles considèrent comme une ingérence dans leur souveraineté, les éléments favorables au changement à lintérieur de ces pays ont apporté un soutien non négligeable à cette initiative. [page-number of print-ed.(French part): 21] 4. Intérêts communs entre lEurope et lAfrique orientale Si les membres de lUnion européenne et les dirigeants dAfrique orientale reconnaissent que le système de commerce mondial est affecté par des changements profonds, en particulier depuis la conclusion de laccord de lUruguay Round et la poursuite de lintégration de lUE, deux faits qui vont modifier radicalement lavenir des relations UE-ACP, il est clair que les deux camps souhaitent ardemment maintenir une certaine forme de relations, moyennant certaines modifications. Les dirigeants de lUE et leurs homologues africains aimeraient par exemple le maintien dune certaine forme de coopération entre les deux régions. Cela est dû en partie aux liens historiques et actuels existant entre lEurope et lAfrique en termes de commerce, dinvestissements, etc. Tout dabord, comme nous lavons indiqué précédemment, les économies de lAfrique orientale sont étroitement liées à lEurope occidentale par le biais du commerce, des investissements, de laide internationale au développement. Il faudra un temps assez long avant quun changement en profondeur puisse sopérer dans ce domaine. Il faut également reconnaître que si la part de lAfrique orientale dans le commerce européen total est minime, ce commerce revêt une grande importance pour les deux régions. Pour lAfrique, lEurope reste de loin le principal partenaire à lexportation et la principale source dimportation. Dans le cas de lUnion européenne, la valeur des exportations africaines est faible, mais la région est une source importante de produits tropicaux comme le café, le thé, etc. et de certains minerais essentiels sur le marché européen. Mais ce qui importe avant tout pour lEurope, cest le fait que lAfrique orientale, avec sa population de près de 200 millions dhabitants est un marché important pour les produits manufacturés de lUE. Le potentiel futur de la région en tant que marché pour les produits de lUE pourrait être encore plus important si elle sort de sa crise économique actuelle. Dautre part, la proximité des deux régions fera quelles continueront à entretenir des liens économiques forts. Deuxièmement, du fait des rapports historiques et coloniaux établis de longue date entre les deux régions, certains Etats membres de lUnion européenne éprouvent un certain sentiment de responsabilité vis-à-vis de lAfrique et sont désireux daider celle-ci à sortir de sa crise actuelle. En même temps, il existe un sentiment parmi la population dAfrique orientale que lEurope a contribué à faire de la région ce quelle est aujourdhui et quelle doit dès lors participer à son redressement. Au cours dun séminaire tenu à Nairobi le 21 mai 1996 sur les relations entre lUnion européenne et lAfrique, un certain nombre de participants africains ont exprimé leur crainte de voir lEurope abandonner lAfrique au moment où cette dernière avait le plus besoin de son aide. Les discussions du séminaire ont montré que si à la fois les participants africains et européens réalisaient que lère du traitement préférentiel dans le cadre de la convention de Lomé touchait à sa fin ou était sur le point de subir des changements profonds, il existait une forme de consensus sur le fait que de nouvelles formes de collaboration pouvaient être élaborées entre les deux régions. Une attention considérable a donc été consacrée à la nécessité de prendre des mesures destinées à accroître les investissements européens directs dans la région. Dans ce cadre, lintérêt est allé en particulier aux investissements dinfrastructure, notamment les projets qui permettront une accélération de lintégration [page-number of print-ed.(French part): 22] des pays de la région qui ont formé un certain nombre dorganes dintégration régionale comme le COMESA, la Communauté de lAfrique orientale et lIGADD. Les transports et la communication entre les Etats membres de ces organisations ont été sérieusement entravés par la déficience des infrastructures telles que les routes, les voies ferrées, les lignes maritimes, etc. qui à son tour limitait les mouvements des personnes et des biens dun pays à lautre. Il existe également un intérêt commun évident entre les deux régions pour renforcer lintégration économique et, par la suite, politique, dans le région. Les membres de lUE et les dirigeants africains considèrent que lintégration économique dans la région est cruciale pour le processus de développement de lAfrique orientale. Il semblerait que la région pourrait offrir de meilleures perspectives dinvestissement, en particulier pour les projets régionaux, si les économies étaient intégrées. Les réformes économiques constituent également un centre dintérêt commun entre lUE et les dirigeants dAfrique orientale. Après une réticence initiale à adhérer pleinement aux réformes économiques introduites dans le cadre du programme dajustement structurel conduit par la Banque mondiale et le FMI, le soutien aux réformes est à présent plus grand. Les dirigeants africains et lUnion européenne semblent être daccord sur limpact positif des réformes dans de nombreux domaines, et notamment dans lamélioration de lenvironnement au bénéfice des investissements étrangers. [page-number of print-ed.(French part): 23] 5. Propositions de réformes dans les relations UE-Afrique orientale Considérant que lUE et lAfrique sont convaincues quune certaine forme de coopération doit subsister entre elles, il est important de réfléchir aux moyens de mettre cette coopération en place. Afin de permettre à lAfrique orientale et à dautres pays africains de bénéficier davantage des efforts de coopération présents et futurs, il est nécessaire déliminer les barrières tarifaires et non tarifaires contre les exportations africaines. Les exportations africaines vers lUE représentent une part insignifiante de lensemble des échanges commerciaux de lUE. En même temps, sils entraînent une réduction à peine perceptible du bien-être de la population de lUE, un tel geste peut revêtir une très grande signification pour les populations concernées. En dépit de ses lacunes, le système STABEX a permis à certains pays de prendre les mesures dajustement suite aux pertes encourues par les fluctuations des exportations de leurs principaux produits de base. En Afrique orientale, les pays producteurs de café ont bénéficié de ce système. Comme bon nombre dEtats membres des ACP continuent à penser que le système est important, il sera nécessaire de se pencher sur ses faiblesses afin de lui permettre de jouer son rôle plus efficacement. Il est apparu clairement entre-temps que dans le contexte de la libéralisation croissante du commerce mondial, lavenir de lAfrique ne se situe pas tant dans les systèmes de traitement préférentiel comme la convention de Lomé, mais plutôt dans des mesures délibérées visant à accroître la compétitivité des pays africains. LUE et les Etats membres des ACP pourraient coopérer à court et à moyen terme afin de formuler une stratégie pour parvenir à cette fin. Il importe également de sattaquer au poids de la dette avant que lAfrique orientale puisse se concentrer davantage sur des mesures de redressement économique. LUnion européenne pourrait jouer un rôle crucial dans la recherche de moyens et de solutions pour alléger le fardeau de la dette de lAfrique afin de créer un environnement plus propice au développement. Les responsables politiques se rendent compte également quà terme, laugmentation des investissements privés en provenance de lUnion européenne dans la région sera plus importante que les aides ou les traitements préférentiels. Le Secrétaire général de la Coopération dAfrique orientale récemment réactualisée a déclaré dans un séminaire récent sur lUnion européenne et ses relations avec lAfrique orientale à Nairobi que les investissements dans la région ont diminué au cours des deux dernières décennies (Daily Nation, 22 mai 1996). Il a toutefois été reconnu quune partie du problème provenait du fait que les investisseurs européens nétaient pas satisfaits du climat dinvestissement en raison des contraintes liées aux questions politiques, administratives, juridiques et infrastructurelles. La libéralisation des économies actuellement en cours dans la région devrait conduire à la mise en place de politiques macro-économiques plus efficaces et créer un environnement plus approprié pour les investisseurs étrangers. Les responsables dAfrique orientale souhaiteraient notamment voir de nouveaux investissements dans les secteurs des transports et des communications ainsi que dans des projets dinfrastructure, qui restent les principales contraintes pour lexpansion du commerce régional. Ils reconnaissent également que les pays dAfrique orientale pourraient en fait gagner davantage dune libéralisation totale des marchés eu- [page-number of print-ed.(French part): 24] ropéens, en particulier pour les produits pour lesquels ces pays sont compétitifs. Lextension des exportations Kenyanes de fleurs coupées sur le marché européen en est un exemple. Les exportations de fleurs coupées du Kenya vers les marchés européens se montaient à 13.000 tonnes en 1994, ce qui faisait du Kenya le principal exportateur africain de fleurs coupées vers le marché européen. Selon les estimations, ce produit de base rapporte au pays entre 30 et 40 millions de dollars par an ces dernières années (Kenya Airways, journal, The Traveller, 1996). Ceci indique clairement que ces pays pourront retirer des avantages substantiels dune vaste libéralisation de laccès dun grand nombre de produits tropicaux au marché européen. Si ceci se produit, les pays concernés pourraient ne plus devoir dépendre des traitements préférentiels. [page-number of print-ed.(French part): 25] Bibliographie Adededji, A. 1996 Africas Expectations Under Lomé IV Concention in the Area of Trad" ECA Banque africaine de développement. Rapports annuels (divers). Banque européenne dinvestissement Rapports annuels. Banque mondiale: Tableaux de la dette mondiale (divers numéros). CNUCED: Guide du commerce international et Statistiques du développement (divers numéros). Davenport M. (1995). The Uruguay Round: Implications for African Commonwealth countries; Unpublished workshop paper. Economic Intelligence Unit, Rapports sur les pays (divers numéros). Ndeti, K. and Gray, K.R. (eds) (1992). The Second Scramble for Africa: A Response and a Critical Analysis of Challenges Facing Contemporary Sub-Saharan Africa. Masaki Nairobi. Magazine Courier (divers numéros). OCDE: Geographical Distribution of Financial Flows to Aid Recipients. Timberlake, L. (1994). Africa in Crisis, East African Educational Publishers Nairobi. Walter Rodney, How Europe Underdeveloped Africa, Tanzania Publishing House, 1976, Dar-es-Salam Whalley J. (ed.) (1988). The Small Among the Big, Vol II. CSIR Research Monograph. University of Western Ontario London, Canada. External Debt Statistics. [page-number of print-ed.(French part): 26] Au sujet de lauteur Gerrishon K. Ikiara est actuellement Maître de Conférences à lInstitut de Diplomatie et dEtudes Internationales et dans le Département dEconomie de lUniversité de Nairobi au Kenya. Ses domaines denseignement et de recherche ont comporté léconomie de lindustrie et du travail, léconomie du développement, les finances publiques et léconomie internationale. Il est co-éditeur de plusieurs livres, en particulier "Industrialisation in Kenya: In Search of a Strategy". Il a aussi fait publier plus de quarante articles dans des journaux et livres sur le Kenya et les économies africaines. Mr. Ikiara a coordonné et/ou participé à divers projets de recherche concernant les entreprises privées en Afrique. Citons comme exemples: linvestissement de la Banque Mondiale dans un programme régional de développement dentreprises (1993-1995), linvestissement de lUNCTAD dans un programme africain coordonné dassistance aux services (CAPAS) entre 1992 et 1996. © Friedrich Ebert Stiftung | technical support | net edition fes-library | Februar 2002 |