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Version français: Charles Valy Tuho:
[Titre]
2. Les contraintes et les potentialités du développement de la région 3. Expériences des relations avec lunion européenne 4. Vers de nouvelles relations Afrique de louest-UE [page-number of print-ed.(French part): 1 = Title] Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik Working papers on EU-Development Policy Documents de travail sur la politique du développement de lUE 3 Charles Valy Tuho LAfrique de lOuest et lavenir des relations entre les pays ACP et lUnion européenne [page-number of print-ed.(French part): 2] Arbeitspapiere zur EU-Entwicklungspolitik La série Documents de travail sur la politique du développement de lUE" traite des questions actuelles de la politique européenne du développement. Elle doit proposer un forum pour discuter doptions politiques concernant la configuration de la politique européenne du développement et le dialogue Nord-Sud. Son objectif est de contribuer à une plus grande transparence sur la voie dune politique européenne du développement coordonnée et cohérente, conformément au Traité de Maastricht. ISSN
1432-9824
La série paraît de manière irrégulière. Elle peut être commandée gratuitement auprès de la fondation: Friedrich-Ebert-Stiftung, D-53170 Bonn/Allemagne.
Copyright 1996 by Friedrich-Ebert-Stiftung
Layout: PAPYRUS Schreib- und Büroservice
[page-number of print-ed.(French part): 3] Charles Valy Tuho
Une analyse des limitations du potentiel de développement régional montre que toute une série de facteurs sociaux, économiques et institutionnels ont entravé lévolution de lintégration régionale. Il faut encore élaborer une approche plus pragmatique de lintégration régionale. Dans ce contexte, lexpérience de la coopération avec lUE montre que Lomé a eu une incidence sur différents domaines au niveau régional grâce aux programmes indicatifs régionaux. Le soutien accordé à lajustement structurel a été développé selon une logique nationale et na pas favorisé lintégration régionale. Une première conclusion est que les effets de la coopération européenne sur le processus dintégration régionale ont été assez négatifs. On attend désormais du secteur privé régional quil participe davantage au processus dintégration régionale. Néanmoins, une coopération renouvelée avec lUE sera indispensable à lavenir. Elle se fondera sur tout un éventail dintérêts communs tant économiques que sociaux. Afin daccroître son impact sur lintégration régionale, lUE devra concentrer son soutien sur des secteurs stratégiques allant du développement des infrastructures à la promotion du secteur privé et à la promotion de la démocratie. Cette coopération renouvelée nécessitera de nouvelles institutions qui restent encore à déterminer. [page-number of print-ed.(French part): 4] Remerciements Ce document a été élaboré en vue du séminaire organisé sur le thème Lavenir de Lomé" par la Friedrich-Ebert-Stiftung à Bruxelles les 10 et 11 juin 1996 et de la conférence intitulée Lavenir des relations ACP-UE au-delà de Lomé IV", tenue du 12 au 14 juin 1996 à Maastricht, à linitiative du Centre européen de gestion des politiques de développement (ECDPM). Nous tenons à remercier lECDPM du soutien quil nous a apporté pendant la phase de préparation de ces études; la coopération régulière et constructive quil nous offre pour traiter de nombreuses questions relatives au développement nous est précieuse. Nous aimerions également exprimer notre sincère reconnaissance à tous ceux qui ont contribué au processus de publication de ces études. Leur aide et leurs effort ont permis la réussite du projet. [page-number of print-ed.(French part): 5]
[page-number of print-ed.(French part): 6] Abréviations
[page-number of print-ed.(French part): 7] 1. Introduction Lorigine des relations entre lAfrique Occidentale et lEurope remonte à une époque lointaine. On sait quà partir du 15e siècle, commença la traite négrière qui prit fin au 18e siècle, et, au 19e siècle la conférence de Berlin procéda au partage de lAfrique et à linstallation territoriale des puissances européennes en Afrique. En Afrique de lOuest, la France regroupa ses territoires en une fédération: lAfrique occidentale française (AOF) comprenant les 9 pays suivants: Bénin, Burkina Faso, Côte-dIvoire, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et plus tard le Togo. Pour la Grande Bretagne: la Gambie, le Ghana, le Nigeria et la Sierra Leone. Pour le Portugal, la Guinée-Bissau et le Cap-Vert, tandis que le Libéria restait indépendant. Lindépendance politique acquise par la plupart de ces pays en 1960 devait entraîner une évolution dans les relations entre lAfrique de lOuest et lEurope. De fait, la création de la CEE en 1957 avait permis linstitution du Fonds Européen de Développement (FED) au profit des anciennes colonies. Ce Fonds fut intégré aux Conventions de Yaoundé dont la première date de 1963. Mais lélargissement de la CEE devait permettre le regroupement des anciennes colonies des puissances européennes et quelques autres pays africains avec des pays des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et la signature de la première Convention de Lomé en 1975. Celle-ci fut suivie de trois autres Conventions de Lomé, toutes de durée quinquennale à lexception de Lomé IV dont la durée est dune dizaine dannées, léchéance étant, comme on le sait, lan 2000. Dans le cadre de cette réflexion prospective sur lAprès-Lomé IV, laccent sera mis sur la coopération régionale, lune des priorités des Conventions de Lomé et trois questions se posent en ce qui concerne lAfrique de lOuest:
[page-number of print-ed.(French part): 8] 2. Les contraintes et les potentialités du développement de la région LAfrique de lOuest connaît une certaine diversité des zones climatiques et des reliefs avec une richesse du sous-sol en minéraux et hydrocarbures et limportance du peuplement, estimé à environ 194 millions dhabitants en 1990 pour lensemble des seize pays de la région. Les potentialités économiques ouest-africaines sont importantes. Mais compte tenu de loptique envisagée, celles des relations entre lAfrique de lOuest et lUE, il nous faut insister sur les problèmes de la coopération et de lintégration régionale, après avoir évoqué les principales caractéristiques économiques et sociales de la région. on évoquera donc:
2.1 Les principales caractéristiques économiques et sociales
Pour les observateurs, lune des principales caractéristiques en Afrique de lOuest est que lespace est un continuum à lintérieur duquel les découpages sont arbitraires. Les frontières nationales définissent des territoires. Ceux-ci sont débordés den bas par lappartenance à des réseaux transfrontières. Ils sont également débordés den haut par les appartenances multiples à des ensembles qui se chevauchent. Il ny a pas ainsi de correspondance entre lespace national défini par les frontières territoriales et les espaces de déploiement des stratégies des opérateurs". [Selon J. Coussy et Ph Hugon: „Intégration régionale et ajustement structurel en Afrique Sub-Saharienne" Ministère de la Coopération Paris 1991 P. 48.] Cest dans ce contexte quon exposera dabord les caractéristiques démographiques et sociales, ensuite les contraintes économiques et institutionnelles.
a) Les caractéristiques démographiques et sociales
Selon létude perspective à long terme de lAfrique de lOuest (1994) [Le club du Sahel et cinergie 1994.] les dynamiques de peuplement expliquent en grande partie lévolution passée de lAfrique de lOuest et détermineront son avenir au moins à léchelle dune génération. La population de lAfrique de lOuest, y compris le Cameroun et le Tchad, est passée de 45 millions de personnes en 1930 à 87 millions en 1960 et 194 millions en 1990. Elle atteindra probablement 430 millions dhabitants en 2020. Cette hypothèse moyenne, retenue par létude, se situe en bas de la fourchette des projections généralement admises et tient compte de limpact de la pandémie du Sida. La proportion durbains au sein de cette population est passée de 4% En 1930 à 14% en 1960 et 40% en 1990. Elle dépassera 60% en 2020. En dépit de la croissance des villes, la population rurale a augmenté de 60% entre 1960 et 1990 et continuera de croître pendant encore au moins deux décennies. En lespace de quatre générations, la région aura donc vu sa population totale multipliée par 10 et sa population urbaine par 100. Ce phénomène est dune telle ampleur quil devient déterminant dans lévolution des économies et des sociétés ouest-africaines et dans la géopolitique régionale. Le nombre durbains est passé de 12 millions à 78 millions entre 1960 et 1990, les villes absor- [page-number of print-ed.(French part): 9] bant près des deux-tiers de la croissance démographique totale. Quant à la caractéristique sociale, elle peut être résumée par le fait que, comme pour toute lAfrique, lon prend de plus en plus conscience dun fait capital: la perte de sa capacité à maîtriser les conditions mêmes de lexistence humaine et à fonctionner comme puissance de créativité spirituelle et culturelle. Doù une crise sociale qui se traduit par laspect dun monde apathique, sans souffle apparent et entièrement soumis aux aléas des interventions extérieures: chocs économiques, politiques, sociaux et culturels.
b) Les contraintes économiques et institutionnelles
LAfrique de lOuest comme espace économique commun est caractérisé par la situation suivante:
Les autres caractéristiques de lespace économique ouest-africain sont bien connus à savoir:
Du point de vue institutionnel, il y a une multitude dorganisations à vocation régionale. Mais les plus importantes sont les organisations de mise en valeur des fleuves, Sénégal (OMVS), Gambie et Mano. A ce regroupement autour des fleuves, fait pendant le regroupement autour du Sahel, le comité inter-Etat de lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS). Les organisations supra-nationales sont principalement au nombre de deux qui mettent en lumière les potentialités de lintégration et de la coopération régionale en Afrique de lOuest. Ce sont: la Communauté Economique de lAfrique de lOuest (CEAO) devenue avec quelques modifications Union Economique et Monétaire de lAfrique de lOuest (UEMOA) et la Communauté des Etats de lAfrique de lOuest (CEDEAO). Mais si la CEDEAO connaît des blocages, ces difficultés sont moindres pour lUEMOA.
2.2 Les potentialités de lUEMOA
A lorigine la Communauté Economique de lAfrique de lOuest (CEAO) est un héritage colonial. Créée en 1966, elle essaie de ressouder la plupart des anciens territoires de lex-Afrique occidentale Française (AOF) avec le Bénin le Burkina, la Côte-dIvoire, la Mauritanie, le Niger et le Sénégal. Ces Etats ont pour objectif de favoriser une croissance plus rapide et mieux équilibrée" et les instruments de la coopération régionale repose sur trois principaux mécanismes:
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produits agréés. Trois produits sont différenciés: les produits du cru et de lartisanat traditionnel qui sont dégrevés de droit de douane; les produits industriels agréés à la TCR et les produits non agréés. A partir de 1994, la CEAO a été remplacée par lUnion Economique et Monétaire de lOuest Africain (UEMOA) ne comportant plus la Mauritanie, mais en plus le Togo et le Mali. Elle intègre en outre laspect monétaire (UMOA).
2.3 Les difficultés de la CEDEAO
Créée en 1975, la CEDEAO regroupe 16 états. Mais il existe de grands écarts de développement entre ces pays. Aussi a-t-on distingué trois groupes en ce qui concerne lapplication et léchéance du désarmement douanier. Le premier groupe est celui des pays les plus riches et les plus industrialisés comprenant le Nigeria, la Côte-dIvoire, le Ghana et le Sénégal. Le second était composé des 12 autres états. Mais par la suite a été identifié un groupe intermédiaire comprenant la Guinée-Conakry, la Sierra Leone, le Liberia, le Togo et le Bénin. Selon le traité instituant la CEDEAO, le but de la communauté est de promouvoir la coopération et le développement dans tous les domaines de lactivité économique avec pour objectifs délever le niveau de vie de ses peuples, daccroître et de maintenir la stabilité économique, de renforcer les relations entre ses membres et de contribuer au progrès et au développement du continent africain " (art. 2). Lobjectif est donc très ambitieux. Cependant le traité nimpose pas lunion monétaire aux états membres, mais il a prévu lharmonisation des politiques monétaires nécessaires au bon fonctionnement de la communauté, et une chambre de compensation de lAfrique de lOuest (CCAO) a été créée en 1975 par les banques centrales des Etats de la CEDEAO. De même a été prévu un fonds de coopération, de compensation et de développement, outil devant servir à améliorer la répartition équitable des coûts et des avantages de lintégration entre les différents états membres de la communauté. Cependant les nombreux rapports et études concernant la CEDEAO constatent tous linefficacité de cette organisation. Ainsi nayant pas de ressources politiques et seulement quelques ressources financières limitées, laspiration à tout faire signifie quon ne parvient à rien faire" (1990).
[Selon M. Diouf: „Evaluation of West African experiments in Economic Intégration" in „The long-term perspective study of Sub-sharian Africa". Vol 4 Proceedings of a workshop on régional intégration and Cooperation. World Bank 1990.]
Les obstacles à de plus grands progrès de la coopération et à lintégration régionales au sein de la CEDEAO sont bien connus: difficultés dordre économique, tels que les obstacles à lintensification des échanges [CF Allech M’BET et Camara Aïssata: groupements écono miques et commerce intra-africain. Une analyse des obstacles à l’intensification des échanges de produits manufacturés en Afrique de l’Ouest. Cah. CIRES n ° 1 Abidjan 1993.] et les problèmes dordre [page-number of print-ed.(French part): 11] monétaire. [CF O. OJO: „Obstacles monétaires et autres problèmes financiers au commerce intra-africain: étude de cas de la CEDEAO" BAD 1987.] Quant aux obstacles politiques ils sont très importants sagissant de la faiblesse sinon du manque de volonté politique des états membres, mais aussi dune certaine crainte vis-à-vis du Nigeria, non seulement en raison de sa puissance économique, mais aussi du fait dune certaine approche culturelle et psychologique. Un humoriste nigérian na-t-il pas indiqué toute la difficulté dêtre nigérian dans How to be a nigerian"? Cependant si lon veut que lintégration contribue substantiellement au développement de lAfrique de lOuest, il serait sans doute nécessaire de passer de loptique de lintégration globale à celle dune approche plus pragmatique dont le premier objectif serait de susciter une plus grande motivation des états membres à faire de la CEDEAO un succès et à procéder à des études pour anticiper les zones de conflit virtuel entre léconomie de chaque pays et les règles de la CEDEAO. Enfin à lactif de la CEDEAO il faut inscrire la création de la Banque Ecobank et surtout celle de la force communautaire de défense Ecomog. Ainsi les contraintes du développement en Afrique de lOuest tiennent principalement aux problèmes économiques et sociaux et aux difficultés de la coopération et de lintégration régionales. La porosité des frontières et de multiples réseaux de commerce font de lAfrique de lOuest une zone de libre-échange de fait". Du point de vue des organisations régionales, selon la Banque Mondiale (1989) la CEAO (LUEMOA) est lunion qui a le mieux réussi; elle sest caractérisée par une convertibilité des monnaies, la mobilité du travail et du capital, et une part non négligeable du commerce intra-communautaire (supérieure à 10%). [In „L’Afrique subsaharienne de la crise à une croissance durable" 1989 P. 179.] [page-number of print-ed.(French part): 12] 3. Expériences des relations avec lunion européenne En Afrique de lOuest, aux relations traditionnelles entre les anciennes puissances coloniales et chacun des états membres de la CEDEAO, se superposent à présent celles entre lUE et lAfrique de lOuest. Ces relations sont diverses et variées, résultant de la mise en oeuvre de la Convention de Lomé, donc des échanges commerciaux et de la coopération dans les divers domaines de lactivité économique: agriculture, industrie et services. La diversité de ces relations est donc évidente: on pourrait en évoquer laspect politique avec lapplication des sanctions à certains états de lAfrique de lOuest qui ne respecteraient pas les droits de lhomme. Il en est de même pour laide humanitaire pour les victimes des conflits locaux comme ceux du Liberia et de Sierra Léone. Cependant dans loptique qui est celle de ce rapport, à savoir le renforcement des liens dintégration et de coopération régionales en Afrique de lOuest dans ses relations avec lUE, laspect à privilégier au sein de ces relations est celui des financements quassure lUE dans le cadre des programmes indicatifs régionaux (PIR) en Afrique de lOuest ainsi que limpact des politiques dajustement structurel sur ce processus et le rôle du secteur privé.
3.1 Les programmes indicatifs régionaux en Afrique de lOuest
La coopération et lintégration régionales sont lun des principaux objectifs affichés de la Convention de Lomé. Depuis Lomé I, des financements sont consacrés à ce secteur de la coopération ACP-UE. Dans le cadre de Lomé IV 125 milliards décus sont repartis pour cinq ans entre les 7 sous-régions ACP. Dans ce contexte, une analyse pertinente des relations entre lAfrique de lOuest et lUE, nécessiterait une recherche plus poussée relative au montant des financements assurés par le programme indicatif régional (PIR), les secteurs dactivités concernés, les délais de financements, et les résultats. Malheureusement pour le moment lon ne peut que se contenter de quelques indications générales, lévaluation critique de ces financements ne pourra se faire quultérieurement. Pour lAfrique de lOuest le montant des financements du PIR a connu une croissance régulière de Lomé 1 à Lomé 3, pour diminuer avec Lomé IV. En effet de 94, 9 Mecu (Lomé I) ce montant a été accru sous Lomé II, (141 Mecu) et surtout sous Lomé III (242, 068 Mecu). Avec le premier protocole financier de Lomé IV, ce montant est de 228 Mecu. Les principaux secteurs dactivité pour Lomé III et IV concernent: les transports et communications, la protection des ressources naturelles et lenvironnement, la valorisation des ressources humaines (à savoir la santé, humaine et animale, la formation, la recherche agricole, la sécurité alimentaire, la coopération culturelle, la pêche) et lintégration régionale sous la forme dappui à lUEMOA, à la CEDEAO et à la Coalition Mondiale pour lAfrique. Il est à noter quaucun montant nest réservé préalablement aux organisations supra-nationales dintégration CEDEAO-UEMOA. Les montants affectés ne le sont que lors de requêtes ponctuelles, ce qui pourrait conduire à un éparpillement des ressources pour le financement des divers projets régionaux la distinction faite entre lAfrique Occidentale côtière et sahelienne nest pas toujours pertinente en raison de la diversité des projets. De fait les observations relatives à lensemble des programmes régionaux sappliquent parfaitement aux PIR de lAfrique de lOuest [Amos Tincani: La coopération régionale sous Lomé: expérience et évolution des trois conventions. Le courrier ACP. Le n ° 112 P. 73.], à savoir: [page-number of print-ed.(French part): 13]
3.2 Lajustement structurel
Comme on la déjà indiqué, lun des objectifs centraux de la Convention de Lomé est le renforcement de la coopération régionale et la création progressive despaces économiques intégrés. Or lUE, notamment dans le cadre de Lomé IV, fait de lajustement structurel lun des instruments de la politique de développment dans les pays ACP. Ainsi se pose le problème des relations entre les programmes dajustement structurel et les perspectives dintégration régionale, notamment en Afrique de lOuest. Or selon J. Coussy et Ph. Hugon (1991), le processus dajustement joue un rôle, positif et négatif, sur les coopérations et les intégrations régionales. Les PAS visent notamment à assainir les finances publiques, à ouvrir et à libéraliser les économies. Mais conçus dans un cadre national, à des dates différentes et selon des séquences diverses, ils rendent incertaine la convergence des politiques économiques nationales. Leurs effets observés diffèrent des attentes. La non prise en compte des interdépendances entre les structures et entre les politiques économiques peut ainsi menacer les intégrations en cours". [In „Intégration régionale et ajustement structurel en Afrique Sub-Saharienne" op cit P. 11.] De fait les résultats de ces ajustements ont été jugés décevants. Il sont restés bien en deçà de ce qui était espéré, dans les pays ACP. [Selon P. et S. Guillaumont: Ajustement et Développement: l’experience des pays ACP. Economica Paris 1994.] Or en principe, lajustement serait un atout pour lintégration régionale dans la mesure où lassainissement des économies nationales devrait créer des conditions plus favorables pour développer une véritable coopération régionale et construire à terme des espaces intégrés. En réalité, lajustement structurel a une logique nationale, aussi bien dans ses objectifs que dans ses instruments. [CF J; cl. Boidin: la coopération régionale à l’éprueve de l’ajustement structurel. Le courrier ACP-CE n ° 112 Nov. Dec. 1988.] Le problème reste donc de savoir si lobjectif de Lomé IV, qui est dadopter un programme dajustement structurel adapté aux conditions spécifiques des pays ACP, peut être atteint dans la mesure où la logique des PAS qui reste par essence nationale, libérale et orientée vers le court terme, peut se concilier avec des stratégies dintégration économique qui relèvent dune approche régionale volontariste et à long terme. Ainsi, pour lAfrique de lOuest, les efforts certes timides tentés par lUE pour lintégration régionale sont limités par les PAS soit des organismes de Bretton Woods, soit de lUE elle-même à travers Lomé IV notamment.
3.3 Le secteur privé et autres acteurs
Les relations entre lUE et lAfrique de lOuest se déterminent principalement dans le cadre des politiques définies par les états membres de lUE et au niveau de la Commission Européenne. Cependant, dautres acteurs sont en jeu notamment au niveau du secteur privé. Cest ainsi que les compagnies de commerce, les sociétés minières, les grandes unités agro-industrielles ou des grandes industries de lUE jouent un rôle dans ces relations. Dans le cadre de lAfrique de lOuest, les stratégies régionales ont été adoptés au niveau des grandes sociétés de commerce comme Bolloré, [page-number of print-ed.(French part): 14] CFAO, SCOA. Ces sociétés sétablissent dans divers états de lAfrique de lOuest et contribuent à lintégration régionale de ces états. De même, divers groupes industriels ont adopté des stratégies similaires. Certes ces sociétés cherchent à réduire les coûts de transaction, à pallier les défaillances du marché et à réduire les incertitudes de lenvironnement. Elles cherchent également à bénéficier des distorsions de politiques économiques en jouant sur les concurrences ou sur les complémentarités nationales. Cependant elles contribuent ainsi au renforcement du processus dintégration. Il en est de même des réseaux dentrepreneurs et des organisations professionnelles. Outre le secteur privé, dautres initiatives peuvent être relevées dans le cadre des relations entre lUE et lAfrique de lOuest. Cest le cas notamment des relations dans le cadre de la coopération decentralisée, entre communes de lUE et de lAfrique de lOuest ou entre universités et centres de recherche. Cest ainsi quavec le programme SADAOC (Sécurité Alimentaire Durable en Afrique de lOuest Centrale), des universités des Pays-Bas coopèrent avec celles du Burkina, de Côte dIvoire, du Ghana, du Mali et du Togo. [page-number of print-ed.(French part): 15] 4. Vers de nouvelles relations Afrique de louest-UE Les nouvelle relations entre lAfrique de lOuest et lUE, pour être pertinentes et durables, doivent reposer aussi bien sur des motivations explicites et surtout sur des intérêts communs que sur la définition de nouvelles priorités dans le cadre de nouvelles institutions de coopération.
A/ Les intérêts communs
La géographie et lhistoire ont tissé des liens tellement étroits entre lAfrique de lOuest et lUE que ces régions ont besoin lune de lautre. Malgré une évolution mondiale qui va dans le sens dune distanciation de ces relations traditionnelles, les intérêts communs actuels et potentiels demeurent dimportance et lon se contentera dans ce document de quelques aspects généraux pour susciter le débat. Ces intérêts communs sont principalement de quatre ordres: Dabord laspect géopolitique qui sexprime par la recherche de la sécurité par lEurope et de la stabilité pour lAfrique. Or depuis la chute du communisme, lune des menaces que lon semble redouter dans lUE cest quelque intégrisme religieux, et une stratégie de contournement de ce danger passerait par lAfrique Occidentale. Du côté africain il est évident que des relations confiantes avec lEurope peuvent contribuer à stabiliser les pays africains et à les rendre plus efficaces, de même ces relations confiantes permettraient en Afrique un approfondissement de la démocratie. Quant aux intérêts économiques réciproques, ils sont évidents: en effet même si les progrès technologiques tendent à une réduction de la demande de matières premières, lUE a encore besoin de produits provenant de lAfrique de lOuest pour la satisfaction de ses besoins: bauxite, pétrole, café, cacao De son côté lAfrique de lOuest, outre les biens déquipement, doit bénéficier de la part de lEurope dun marché dexportation et des aides alimentaires ainsi que des moyens nécessaires pour la lutte à conduire contre la pauvreté et la faim, qui ont un effet de déstabilisation sur la région. Sur le plan social, les intérêts communs peuvent être soulignés sur deux plans principaux: Dune part la situation démographique en Afrique de lOuest est bien connue: elle se traduit par une explosion qui alimente des flux migratoires internes et externes, flux que lEurope tente de contenir, notamment lémigration sauvage. Dautre part, les problèmes de santé sont aigus, notamment la lutte contre les épidémies diverses, surtout la pandemie du SIDA. Enfin, du point de vue de lenvironnement, les interêts communs ont été mis en lumière dans le cadre de la conférence de Rio et ladoption des programmes de défense de lenvironnement dans le cadre du village planétaire". Dans tous ces domaines dintérêt commun, le problème qui se pose est celui de léquilibre et la nécessité de rendre visible linteraction entre les deux groupes de pays. En outre, dans des pays comme ceux de lAfrique de lOuest où lorganisation de type traditionnel est toujours présente, le lien entre tradition et modernité est fondamental et implique une gestion décentralisée.
B/ La future coopération
Limportance et la diversité des forces de changement dans les relations entre lUE et les pays ACP sont évidentes; il sagit notamment de la mondialisation de léconomie, de lapprofondissement de lUE et de son élargissement, de la [page-number of print-ed.(French part): 16] création de lorganisation mondiale du commerce (OMC) ou des innovations technologiques. Tous ces changements entraînent lapparition dun contexte mondial nouveau qui rend nécessaire une réflexion prospective autonome au niveau de chacune des régions ACP. Lobjet de la coopération est bien de rendre les pays ACP plus autonomes en les engageant sur la voie dun développement endogène. Or cette indépendance réelle ne peut être effective que dans le cadre régional, il est donc nécessaire que la coopération rénovée adopte loptique dune stratégie régionale. Au niveau de lAfrique de lOuest cette stratégie régionale devra mettre laccent sur quelques secteurs stratégiques et le problème institutionnel. Il nous faut ainsi évoquer:
4.1 LAfrique de lOuest et les Futurs de la Convention de Lomé
La conférence de Maastricht qui, en Juillet 1990, a créé la coalition Mondiale pour lAfrique (CMA) avait abouti à un consensus tendant à confier à lUE un rôle majeur dans le renforcement de lintégration régionale en Afrique et à situer la démarche pour lanalyse des problèmes africains dans le cadre détudes prospectives à long terme. Cest dans ce contexte que lon se propose au Centre Ivoirien de Recherche Economique et Sociale (CIRES) de réfléchir, dans le cadre dun atelier sur lAfrique de lOuest et les futurs de la Convention de Lomé. Il sagit de définir la problématique de ces évolutions:
A cet effet lon procédera à la construction de trois ou quatre scénarios contrastés de lévolution de ces relations dans le cadre de lintégration en Afrique de lOuest. Ensuite, il faudra déduire de ces scénarios les principaux thèmes de recherche qui permettent de donner une réponse pertinente aux principaux aspects de lAprès-Lomé IV en Afrique de lOuest. Cette démarche tient à la nécessité dun nouvel engagement politique dont la base dépend, cest évident, de notre vision du futur. La priorité ainsi accordée à lintégration régionale dans la vision du futur permet également daccroître lefficacité de laide de lUE en atténuant le problème de sa fongibilité cest-à-dire déviter que laide entraîne un accroissement des dépenses en biens de consommation, comme laffirme la théorie de la fongibilité de laide.
4.2 Les secteurs stratégiques de coopération
Dans le cadre dune coopération rénovée entre les pays ACP et lUE certains secteurs dactivité apparaissent stratégiques pour lintégration économique en Afrique de lOuest aussi bien pour la CEDEAO que pour lUEMOA. Il sagit principalement des secteurs suivants, pour lesquels des contrats périodiques de projets à objectifs précis devraient être conclus, avec des critères de performance. a) Les infrastructures dintégration Il sagit du développement des transports (routiers, ferroviaires, aériens et maritimes), des télécommunications et de lénergie en vue dune intégration effective des pays de lAfrique de lOuest. b) Les ressources humaines et la recherche La nécessité dune recherche autonome dans les pays africains est bien connue, de même que les difficultés datteindre le seuil critique defficacité de cette recherche dans chaque pays: lappui de lUE est donc nécessaire pour développer cette [page-number of print-ed.(French part): 17] activité à léchelon régional en favorisant dune part la constitution de pôles régionaux de formation et de recherche, dautre part laccès aux réseaux de linformation. De même, le renforcement des capacités des ressources humaines est nécessaire (capacity building", formation, santé). c) La promotion du secteur privé LUE est sollicitée dans divers pays ACP pour faciliter le processus de privatisation de certaines entreprises. Mais apparaît la nécessité de promouvoir le secteur privé comme facteur dintégration régionale et de laccroissement de la compétitivité de léconomie régionale. Cest dans ce contexte régional quun partenariat efficace entre secteurs privés européen et africain pourra mieux se développer, aussi bien pour le partenariat industriel que pour les stratégies commerciales. d) Le financement du développement et la dette extérieure Dans le cadre de la coopération rénovée entre lUE et les ACP, il sera nécessaire de réfléchir au problème des moyens permettant de mieux drainer les investissements étrangers dans les pays ACP. La conversion des dettes publiques en actifs dentreprises à privatiser pourrait être lun de ces moyens. Pourrait-on envisager dans ce contexte la création dun Fonds Monétaire et dune Banque de Développement euro-africains comme le proposent certains auteurs? [CF, Le groupe Nobil, in „Pour une nouvelle alliance Afrique-Europe" Futuribles Paris 1992.] Il sagirait de transformer des créances sur lAfrique en une dette perpétuelle de lAfrique envers ce fonds et la banque grâce au paiement de la moitié des contributions des pays de lUE sous forme de créances décotées après renoncement aux intérêts. Cette proposition, bien que pertinente, supposerait une très forte motivation de lUE pour une nouvelle coopération avec les pays africains. Pour le moment, laccès à des financemnts adaptés, notamment grâce à une large ouverture de laccès aux crédits de la BEI, serait très utile de même quun appui à la convertibilité des monnaies, à la stabilité et la coopération monétaires en Afrique de lOuest. De même lappui au développement de marchés financiers. e) Lenvironnement: le Sahel, les forêts et lagunes Lappui de lUE dans ce domaine devra être mieux défini quil sagisse de la lutte contre la désertification dans le cadre du CILSS ou de celle contre la déforestation, de la pollution des lagunes ou de lérosion des côtes maritimes. f) Gouvernance et Démocratie Dans le cadre de lintégration régionale, la stabilité des régimes politiques des états membres de la CEDEAO pourrait être mieux assurée grâce dune part à la reduction sinon à lélimination des conflits frontaliers, dautre part à la coopération en vue de resoudre les conflits internes. Par ailleurs la coopération régionale dans le cadre dinstitutions supra-nationales tend à réduire le caractère quelque peu patrimonial des divers états de la région soit donc des mesures tendant à les déprivatiser, ce qui en retour, concourt à la recherche de nouveaux paradigmes dintégration en Afrique de lOuest et à lapprofondissement de la démocratie participative dans la région. De même lUE pourrait contribuer à léveil des forces sociales pour promouvoir la volonté politique dintégration régionale grâce à une campagne populaire soutenue par les intellectuels, les médias, les syndicats, les fédérations professionnelles etc. [page-number of print-ed.(French part): 18] 5. Conclusion:
Les résultas de la réflexion sur les domaines de la coopération rénovée permettront de mieux concevoir les institutions de cette coopération. Cependant, il est à noter que les problèmes deviennent de plus en plus complexes et spécifiques dans chacune des régions du groupe ACP et que la diversité entre les groupes saccentue. Cependant la nécessité dune unité daction simpose en vue de se constituer comme puissance de négociation. Une coopération vraiment rénovée suppose un dialogue politique à un haut niveau aussi bien dans le cadre ACP-UE quà celui des différentes régions pour des questions particulières à ces régions. Le caractère durable et lefficacité de cette coopération rénovée seront fonction du respect mutuel, mais aussi de lintensité de ce dialogue au profit des intérêts réciproques.
(Quelques données économique 1994)
Source: Calculs selon les statistiques de BAD: Rapport sur le Développement en Afrique 1995".
[page-number of print-ed.(French part): 19] Au sujet de lauteur Le Professeur Charles Valy Tuho est actuellement chercheur au Centre de Recherche Economique et Sociale (CIRES) à Abidjan en Côte dIvoire. De 1983 à 1993 il a été lAmbassadeur de Côte dIvoire auprès des pays du Bénélux et de la Communauté Européenne. Il a aussi eu une carrière remarquable comme Professeur de Sciences Economiques (1970-1972) à lUniversité dAbidjan, comme doyen de la Faculté des Sciences Economiques (1972-1974) et comme Recteur de lUniversité dAbidjan (1974-1983). Le Professeur Tuho est membre du Conseil de lUniversité Volante Internationale (U.V.I.) à Genève. De 1986 à 1992 il a été membre du Conseil de lInstitut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI) à Washington. Il a aussi été membre du Conseil de lUniversité des Nations-Unies à Tokyo (1980-1985). Il a obtenu en 1970 lAgrégation de Sciences Economiques à Paris. Il a soutenu en 1965 sa thèse de doctorat de Sciences Economiques à Paris après y avoir obtenu en 1962 un D.E.S. de Sciences Economiques. © Friedrich Ebert Stiftung | technical support | net edition fes-library | Februar 2002 |