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[page-number of print ed.: 11 ] I Le COSEF dans lenvironnement politique sénégalais et le contexte des élections 1. Le COSEF dans lenvironnement politique sénégalais Les journées détude et de réflexion sur Femmes en Démocratie au Sénégal, initiées par lInstitut africain pour la Démocratie (IAD), ont eu à regrouper des femmes des partis politiques, des groupements économiques féminins, des organismes de promotion de la femme, des femmes de la société civile, des étudiantes, le ministère de la Femme, de lEnfant et de la Famille. Cette rencontre avait permis aux séminaristes de faire le constat unanime suivant :
Convaincues de la nécessité «dune structure de concertation nationale, légère, fonctionnelle et représentative de lhétérogénéité des centres dintérêt des femmes sénégalaises», les séminaristes ont décidé de satteler à la création du COSEF en mettant sur pied un comité dinitiative présidé par lécrivain Aminata Sow Fall.
[page-number of print ed.: 12 ] nement historique», ou encore «daccouchement au forceps» : latmosphère de lAssemblée générale constitutive montre, dans une certaine mesure, que la générosité de lidée na pas pour autant facilité sa concrétisation. Ce qui devait faire la spécificité du COSEF a aussi été ce qui a inspiré le plus de suspicion, de réticence ou dinterrogations.
[page-number of print ed.: 13 ] femmes : on peut évoquer dune part la nécessité de «visibiliser» laction des femmes; dautre part, limpératif de renforcer et dapprofondir la démocratie sénégalaise. Le COSEF peut être considéré comme la résultante dun paradoxe qui se donne à voir à travers quelques éléments : une implication massive des femmes dans la politique dune part, dautre part une marginalité des questions relatives à la femme dans les agendas politiques, ainsi que linsuffisance de femmes élues dans les sphères de décision. Ce paradoxe est tributaire de lhistoire de la société sénégalaise qui donne configuration à un imaginaire politique masculin. Il y a en effet «une division de laction et du champ politique qui maintient la femme dans un rôle de médiation et de subordination, et parallèlement, érige lhomme en bénéficiaire absolu du système, et donc en fait lunique acteur, lunique sujet
[DIAW A. & TOURE A., op. cit., p.14]
». Il est vrai que la trajectoire des femmes en politique, au regard de cette histoire et de la mémoire dont elle est porteuse, ne peut être quambiguë
[CISSE WONE K., Femmes et Pouvoir politique, COSEF-Info, p.25]
; ce qui les met au service dentrepreneurs politiques
[ibid. p.26].
[page-number of print ed.: 14 ] Lenquête réalisée par le GREF [GREF, "La place des femmes dans les instances décisionnelles", Dakar, décembre 1998.] pour mesurer le degré dimplication des femmes dans les instances de décision pour les formations politiques actuellement représentées à lassemblée nationale est assez édifiante : sur les onze partis, cinq ont un pourcentage de femmes situé entre 10 et 13% (PS, PDS, URD, CDP, PIT), quatre partis entre 20 et 27 % (AJ/PADS, FSDBJ, PDSR, BCG), deux partis ont entre 0 et 6 %(LD/MPT, RND). Le pourcentage moyen de 14,40% montre de façon non équivoque la très faible représentation des femmes dans les instances de décision des partis, la trajectoire encore très ambiguë des femmes du fait des contraintes qui perdurent. Il sagit néanmoins, au-delà des contraintes qui perdurent, de préciser quil y a eu une évolution même timide, amorcée dune part par le mouvement associatif féminin au milieu des années 70, à la faveur de lAnnée internationale de la Femme et de la proclamation de la décennie, dautre part au milieu de la décennie 80 avec le discours radical sur les femmes, produit par les sections féminines des partis politiques de gauche, par des groupes comme Yeewu-Yewwi ou Femmes et Société. Il sagit là dun acquis considérable qui a libéré la parole féminine en mettant laccent sur les discriminations de toutes sortes dont les femmes font lobjet. Le COSEF est lhéritière de tout ce processus historique qui va inscrire la parole féminine dans lespace de la cité. On peut donc mettre en rapport la libération de la parole féminine avec la libéralisation du champ politique. Ce qui, peut-être, est remis au goût du jour pour les femmes depuis la fin de la décennie 80, et surtout dans les années 90 cest la nécessité de la prise en charge de la dimension genre et surtout la conscience aiguë quelles écriront ensemble leur histoire, par-delà leurs appartenances politiques respectives.
[page-number of print ed.: 15 ] partis. Comment adjoindre, à la dynamique de pouvoir qui informe laction politique, une autre, démocratique celle-là, pour quil y ait plus de femmes dans lespace public, dans les sphères de décision? Ces questions nétaient pas absentes de lesprit de ces femmes qui ont créé le COSEF et qui continuent encore à le faire vivre. Elles justifient la présence du COSEF dans le processus électoral, moment fort de la République, et procédure par excellence de la Démocratie. La préoccupation première ici est de voir comment le COSEF, dans ce temps fort de la République et de la Démocratie, inscrit la question de la femme au cur des préoccupation politiques ? Quels sont les mécanismes mis en place par lorganisation pour quil y ait jonction entre la logique de pouvoir et la logique démocratique, entre lenjeu de pouvoir et lenjeu démocratique ? Laction du COSEF dans les élections de 1996 et celles de 1998 servira à cet effet de terrain danalyse. Il convient dès lors de sintéresser avant tout au contexte des élections de 1996. 2 - Elections locales de novembre 1996:La femme, simple objet de convoitise ou actrice de sa mutation politique ? 2.1 - Contexte général des élections locales de novembre 1996 A son accession à la souveraineté internationale, le Sénégal avait adopté une politique de décentralisation progressive. Il convient de rappeler que la première collectivité locale au Sénégal date de 1872 ; en 1960, le pays comptait déjà 33 communes.
[page-number of print ed.: 16 ] Ce processus va se poursuivre en 1996, date de ladoption de la loi n° 96.06 portant Code des Collectivités locales et qui rassemble les textes de loi de la décentralisation. Cette réforme est définie dans un souci de répondre à la double préoccupation de liberté et de proximité: «des autorités décentralisées et proches des citoyens libres de leurs décisions, des représentants de lEtat sur le terrain, dotés de pouvoirs déconcentrés, un contrôle de légalité adapté» [Textes de loi de la décentralisation, p. 6] , Ainsi trois ordres de collectivités locales sont établis : les régions, les communes et les communautés rurales ; les dix régions du Sénégal devant compter 378 collectivités locales avec deux niveaux de base et un niveau intermédiaire. A la page 8 du Code des Collectivités locales, il est stipulé que celui-ci entrera dans sa phase dapplication «à compter de linstallation des conseils régionaux, municipaux et ruraux, issus des élections locales qui suivent sa date dentrée en vigueur». Il apparaît clairement, à la lecture de ces dispositions, que lélection de ces conseillers régionaux, municipaux et ruraux lors des consultations de novembre 1996 constituaient un enjeu très important pour lensemble des acteurs politiques sénégalais. Lors du séminaire du Mouvement national des Femmes socialistes du 17 août 1996 sur le thème «régionalisation et technique de vote», M. Souty Touré, Ministre de la Décentralisation de lépoque, disait à propos de la politique de régionalisation et en faisant un parallèle entre Mai 1968 et Février 1988 : «elle permettra de désamorcer les effets explosifs des contestations sociales et éteindre les foyers de tension en permettant aux groupes de base de contrôler la gestion publique. Lespace régional sera le lieu où les masses pourront instaurer le débat». Cette réforme administrative répond bien à des préoccupations de gestion politique des populations par une démarche censée les contenir dans leurs velléités de rébellion. [page-number of print ed.: 17 ] Les enjeux déterminants des futures consultations électorales de novembre 1996 vont dailleurs marquer particulièrement le champ politique tout au long des différentes tribulations enregistrées par le parti au pouvoir, le Parti socialiste. Les douloureuses opérations de renouvellement du personnel politique au sein du PS ont constitué une étape dans le processus de réorganisation-réorientation du parti en vue des prochaines élections. La victoire à ces consultations électorales constitue de manière déterminante un bon positionnement pour les élections législatives de mai 1998 et partant celles présidentielles de février 2000. Dailleurs, au congrès du 30 mars 1996 défini par les observateurs politiques comme le congrès ayant marqué lhégémonie des «refondateurs» sur le Parti socialiste, le Président Abdou Diouf dira «[ ] ou nous remportons ces élections régionales et locales ou nous enregistrons une défaite qui peut être irrémédiable pour notre avenir» [Walf n° 1216, avril 1996, p. 6.]. La restructuration du parti décidée lors du congrès extraordinaire de juillet 1994 sera concrétisée par le redécoupage des instances de base [Les coordinations passent de 46 à 86] et ce, dans le souci «dune meilleure gestion du parti en adoptant une démarche de proximité envers les militants». Les paroles du président Diouf rappelées plus haut étaient dautant plus importantes et nécessaires que les blessures ouvertes, occasionnées par les opérations de renouvellement, ne sétaient pas encore refermées et menaçaient de gangrener le PS, en remettant en cause son unité et sa cohésion face à lui même et à lopposition. La mise sur pied dune Commission de Conciliation et de Vérité, dirigée par Cheikh Abdoul Khadre Cissokho, Président de lAssemblée nationale, sera nécessaire pour aplanir les divergences et faire taire les querelles. Du reste, Abdou Diouf rappelait toujours dans le même discours que les investitures pour les élections de novembre 1996 ne doivent pas exacerber les frustrations des opérations de renouvellement mais, bien au contraire, veiller à les aplanir en ne considérant pas les «investitures comme [page-number of print ed.: 18 ] la traduction mécanique des renouvellements qui sont internes au parti alors que les investitures doivent avoir une dimension extérieure et nationale». La création du poste de Président du parti, secondé par un Secrétaire général chargé dadministrer le parti, participe également des réformes de taille initiées au sein du PS. Articulés à la restructuration du Parti socialiste, il convient de dire que les enjeux des futures consultations électorales ont été perçus très tôt. Quel a été le comportement des femmes de ce parti lors de tous ces remous ? Les opérations de renouvellement ont été l'occasion pour les femmes de ce parti de donner la pleine mesure de leur importance.
[page-number of print ed.: 19 ] que compte la Région de Dakar. Dans ce bras de fer, elle a cependant dû sincliner face aux directives du Président Diouf de céder la présidence de lUnion régionale à la «mère du parti» et de se contenter du poste de première adjointe. Les femmes de la tendance de Aïda Diongue mécontentes sétaient déplacées en masse dans les bureaux de Walfadjri [Groupe de presse privé] pour manifester leur désaccord aux yeux de lopinion publique. Elles avaient même signé une lettre pétition adressée au Président Diouf, «une première dans lhistoire du parti socialiste» [Walf n° 1137, 28 décembre 1995, p. 4] pour marquer leur non adhésion aux directives jugées antidémocratiques. Il était impératif pour la direction du parti de trouver une solution à cet épineux problème pour ne pas se mettre à dos une frange de lélectorat féminin à lapproche de novembre 1996, dautant plus que le souvenir de la défaite du Parti socialiste à Dakar aux élections de 1993 les hantait encore. Aïda Diongue cédera également à Adja Arame Diéne le poste de Vice-présidente du Mouvement national des Femmes socialistes, dont la présidence sera confiée à Aminata Mbengue Ndiaye, Ministre de la Femme, de lEnfant et de la Famille. Cette même fronde aurait pu se cristalliser à Kaolack, où Madame Mata Sy Diallo, donnée vainqueur pour être portée à la tête de lUnion régionale, sera «invitée à se ranger» et à laisser la place à Abdoulaye Diack. Le combat des femmes ne fut pas toutefois vain même si les résultats ne marquèrent pas un tournant décisif dans leur quête dune démocratie plus juste à leur égard. A lissue des opérations de renouvellements, quelques femmes se sont distinguées en tant que responsables de Coordination dont notamment Léna Diagne Fall de la 3e Coordination, Aïda Diongue, Adja Rokhaya Siby et Mata Sy Diallo. [page-number of print ed.: 20 ] Si nous avons particulièrement insisté sur ces remous au sein du Parti socialiste, cest parce que ces événements, partie intégrante du processus électoral de novembre 1996, ont fortement émaillé la scène politique à cette époque. Les autres partis se sont également mobilisés dans la mesure où ils avaient une claire conscience des enjeux des futures élections. Pour lopposition, acquérir des positions de pouvoir au sein des mairies, communes et conseils régionaux était une donne politique non négligeable en vue des élections de 1998 et des élections présidentielles de lan 2000, dautant plus que pour beaucoup dentre eux,il sagit dune première participation à des élections locales. Par exemple, cest en vue de ces élections que AJ /PADS, entre autres raisons, enregistre, pour la première fois de son histoire, une Conférence nationale des Femmes, même si le débat sur cette question avait été initié bien avant. Dans son discours d'ouverture lors de la conférence tenue en juillet 1996, le Secrétaire général du parti, Landing Savané, souligne «limportance de cette conférence tenue à lorée des élections locales de 1996 mais aussi en vue du «folli» à lhorizon 2000 afin dinstaurer une société démancipation ou les femmes sépanouiront pleinement». La résolution Femmes et Pouvoir politique, adoptée lors de cette conférence, est très explicite :
Considérant lenjeu des prochaines élections municipales et rurales en relation avec le processus de décentralisation et de régionalisation en cours comme une profonde modification dans la gestion du pouvoir; Considérant loubli total et volontaire qui frappe leurs problèmes dès le lendemain des élections malgré linsistante sollicitation dont elles font lobjet dans un but purement électoraliste, Décide de saisir les prochaines élections municipales et rurales pour [page-number of print ed.: 21 ] asseoir une forte participation des femmes à la gestion de la chose publique et dans les espaces de pouvoir, Décide de combattre le monopole des hommes et déviter le système de quota pour ne pas déboucher sur des rôles de figuration, Exige comme solution transitoire la représentation des femmes dans toutes les instances du parti et sur les listes électorales et en bonne position bien que la parité soit plus conforme à nos options politiques fondamentales, Engage AJ/PADS à mettre la problématique féministe au cur de son projet de société, de ses programmes électoraux, nationaux et locaux».
Les femmes de la LD/MPT et de la CDP ont également tenu leurs assises dans cette période : au cours de ces différentes rencontres, il a beaucoup été question de linvestiture des femmes sur les listes électorales. 2.2- Femmes et investitures : enjeu de démocratie ou enjeu de pouvoir ? Linvestiture des femmes était au centre des préoccupations des organisations de femme aussi bien à lintérieur quà lextérieur des partis. Le COSEF avait mené dans ce sens un programme spécifique de sensibilisation des leaders politiques pour linvestiture en masse des femmes sur les listes électorales. Ce programme dappui à linvestiture des femmes aux élections de novembre 1996 sest traduit par des rencontres avec les secrétaires généraux des partis politiques, la participation au forum de capacitation des femmes candidates organisé par le COFDEF à Thiés le 3 novembre 1996, et par la publication dans la presse quotidienne de slogans en faveur de linvestiture des femmes. [page-number of print ed.: 22 ] Que pouvons nous constater à lissue des investitures ? Au PS, lors du congrès de juillet 1990, les femmes avaient fait adopter une résolution spéciale relative à ladoption et lapplication dun quota de 25% en leur faveur pour les listes dinvestiture aux élections et la présence dans les structures du parti. Il faut rappeler que ce quota était initialement de 10% et que cette évolution a suivi les positions de lInternationale socialiste des Femmes sur cette question spécifique. A lissue des investitures, deux tiers des coordinations ont assuré le quota de 25%, dautres lont porté à plus de 25%. La Communauté rurale de Ngéniéne a même assuré la parité. Par contre les coordinations de Linguère, de lUnion départementale de Matam, Kédougou, Ziguinchor Département nont investi aucune femme. La Commission de Supervision des Investitures (qui était en fait la Commission de Vérité et de Conciliation ) aurait même veillé à ce que le classement sur les listes proportionnelles obéissent au quota des 25%. Au PDS, des femmes avaient été investies tête de liste comme Aminata Tall et Awa Diop aux municipales et régionales. A la CDP, le quota de 40% initialement annoncé na pas toujours été respecté, mais les femmes ont pu bénéficier de bonnes positions, et à Dakar-Plateau, Mme Khady Guéne Fall, sur de feue Mantoulaye Guéne, ancienne responsable socialiste et Ministre de la République, a été choisie tête de liste pour le contrôle de la mairie. A AJ/PADS, les femmes avaient récusé le principe des quotas comme noté plus haut dans la résolution Femme et Pouvoir politique adoptée lors de leur toute première conférence nationale. Il y aura néanmoins quatre femmes tête de liste à Dakar et dautres à lintérieur du pays. A la LD/MPT, les investitures se sont faites selon les réalités de chaque localité. Par exemple à Saint-Louis, Mme Aïda Mbaye était en tête sur la liste départementale. [page-number of print ed.: 23 ] Au PIT, le principe du quota navait pas été retenu daprès la Présidente de lUnion démocratique des Femmes du Sénégal, instance des femmes de ce parti. La Présidente de lUDFS est dailleurs tête de liste à la proportionnelle et est suivie dune autre femme. La liste PIT de Mermoz est pour moitié composée de femmes. Elle a eu cependant à déplorer le fait quen cas de coalition entre partis, les femmes sont souvent perdantes comme cela a été constaté par exemple dans le cadre de la coalition PIT-PDS lors des consultations électorales de novembre 1996 [Source Soleil n° 7918, 24 octobre 1996, article signé Dié Maty Fall.]. Les élections de novembre 1996 ont permis de noter une réelle poussée des femmes. Le problème de leur place dans la composition des bureaux va également se poser, et dans une certaine mesure, répondre aux mêmes préoccupations électoralistes et manuvres politiciennes. On note lémergence de six femmes maires, deux présidentes de Conseil rural et une vice-présidente de Conseil régional, Mme Mata Sy Diallo [Son destin politique semble aujourd’hui inscrit au cœur de cette confrontation d’une logique de pouvoir et d’une logique démocratique ; la question de la succession au poste de Président du Conseil régional de Kaolack, laissé vacant par Abdoulaye Diack, désormais président du Sénat, ramène le cas Mata au cœur des questionnements relatifs au rapport des femmes à la politique.]. Il faut noter avec le GREF que dans lensemble, les femmes «représentent 14,46% des élus locaux». Cependant concernant la présidence de ces instances, ce taux connaît une chute vertigineuse, se retrouvant à 1,84%.
Avec une réelle prise en compte de la dimension femme lors des investitures, le contexte politique en 1996 a semblé favorable aux femmes. [page-number of print ed.: 24 ] On assisté à une véritable surenchère de la part des différents partis qui ont rivalisé de générosité en affichant leur volonté de promouvoir les femmes. Que faut-il en déduire ? Un premier niveau de lecture de cette donnée électorale permet de dire que les partis ont gagné en maturité sur la question de la femme et quun processus apparemment irréversible de positionnement des femmes sur la scène politique sest enclenché ; leurs voix sont désormais considérées mais aussi rendues audibles par elles mêmes et pour elles mêmes. Sommes-nous alors entrain dassister au début de la fin de lère de linstrumentalisation de lélectorat féminin ? Ne faut-il pas simplement considérer la réalité électorale liée à la nature même de ces élections ? En effet ny avait-il pas lieu dêtre large et généreux à légard des candidates quand on sait quil fallait, pour ces élections, pourvoir plus de vingt mille postes sur toute létendue du territoire national. La tentation est grande de pousser la réflexion sur le terrain du cynisme pour dire «quil y avait de la place même pour les enfants». Malgré une circulaire du Secrétaire général demandant lapplication du quota de 25% sur les listes dinvestitures, cette disposition na pas été adoptée par toutes les coordinations du PS. Le Bureau politique, qui était censé rejeter les listes rebelles aux directives, na pas été systématique dans la traduction effective de cette disposition dans les faits. Il faut, dans cet ordre didées, convenir que lapplication dune politique volontariste de promotion des femmes, par la prise en compte des quotas ou de la parité, a largement été tributaire des calculs relatifs à des préoccupations électoralistes. Lapplication des quotas na pas résisté aux exigences de la «realpolitik», car objectivement un parti prend part à des élections dans le but de les remporter et pour cela met tous les atouts de son côté, aussi bien du point de vue des moyens que des ressources humaines. Par conséquent, il sagit dinvestir dans ce sens des porteurs de voix. Le point de vue de Mme [page-number of print ed.: 25 ] Aminata Mbengue Ndiaye, répondant à une question relative aux investitures dans son parti, le PS, dans le cadre dune interview accordée à Nouvel Horizon, est assez significatif : «Les listes que nous allons investir seront dabord pour assurer la victoire. Cest après quon verra qui mettre à la tête des régions et des communautés» [No 3 du mois d’octobre 1996,p10]. Logique de pouvoir qui impose elle-même sa propre légitimité, différente bien entendu de celle de la logique démocratique, qui regarde du côté des ambitions universalistes et de la justice citoyenne. Deux logiques appelées à sentrechoquer et à cohabiter, et dont la prise en compte est fondamentale dans le combat des femmes. Si les femmes peuvent saccorder à la logique de pouvoir qui informe laction de leurs partis respectifs, elles entendent aujourdhui que priorité soit donnée à la logique démocratique. Leur combat désormais se fonde sur la connexion de ces deux logiques, et cest sans doute ce qui explique quun mouvement transpartisan comme le COSEF puisse exister. Lengagement du COSEF dans le processus électoral ne peut se comprendre que dans cette optique. © Friedrich Ebert Stiftung | technical support | net edition fes-library | November 2000 |