Wolfgang Kraushaar,
La scène "sponti" de Francfort. Entre subculture et tentative d'expérience politique
Après la dislocation en 1969 du mouvement d'opposition extra-parlementaire (APO), plusieurs sectes politiques maoïstes ainsi que divers subcultures se formèrent dans les années soixante dix. La plupart d'entre-elles étaient refermées sur elles, tandis que d'autres étaient tournées vers l'extérieur. Celles-ci revêtaient une dimension politique qui eut de nombreuses conséquences. Dans la mesure où le noyau du groupe "lutte révolutionnaire" qui avait d'abord cherché en vain à mobiliser la classe ouvrière d'une entreprise de production automobile (Opel, Rüsselsheim) en faveur de la lutte des classes, parvint à faire valoir la spontanéité comme une valeur positive alors que celle-ci était généralement réprouvée par la gauche traditionnelle et en particulier la gauche communiste, un champ d'expérimentation socio-culturel put s'ouvrir. En son centre, le mouvement des squatters de maisons parvint à mettre sous pression, dans le cadre de la politique communale, le SPD qui constituait alors la force politique dominante à Francfort. La transformation d'un quartier auparavant bourgeois tel que le Westend en un quartier de bureaux afin de répondre aux besoins du secteur tertiaire en expansion alla de pair avec la destruction croissante d'espace résidentiel et interpella en même temps la conscience sociale de la Social-démocratie. Les cadres dirigeants de la scène "sponti" s'appuyèrent sur cette contradiction et encouragèrent dans les squats la formation de communautés de colocation. Celles-ci furent pour un temps perçues comme des "espaces libérés" qui étaient plus porteurs d'espoir que la seule prise de position en faveur du modèle révolutionnaire anti-capitaliste - celui-ci demeurant abstrait. De ces communautés de colocation, on attendait la transformation profonde des formes de vie. Au milieu des années soixante dix, il était alors clair que le concept de révolution anti-capitaliste, lié à la constitution d'une subculture propre, mènerait à une impasse. Toutes tentatives de transformer ce concept en un véritable courant alternatif à partir de la création de petites entreprises échouèrent. La correction du cours qui avait été engagé ne fut alors possible que par le recours au parlementarisme, cette fois-ci sous la bannière de l'écologisme. Ainsi le mouvement "sponti" était-il irrémédiablement arrivé à son terme, mais pour une partie de ses artisans alors engagés dans la Realpolitik du parti des verts, il faisait également face à un nouveau début. La participation à la politique communale, régionale et nationale peut être vue, tout comme la nouvelle définition de styles de vie dans un contexte socio-culturel, comme un résultat de ce processus changeant.